24.9.06

Triste dimanche

Il n'y avait plus de confiture de prune ce matin. Plus de beaume qui aurait pu me donner le courage nécesaire en me faisant voyager dans le vert Bessin. Non plus rien. Ce matin, la cuisine était grise, à peine éclairée par le ciel pisseux et gris.
6 heures. Le réveil qui sonne. Les informations, la météo me donnent envie de m'enfoncer plus profondément dans la ouateur de la couette. Pas envie de me lever. Pas le courage, surtout. Quelle horreur que de se lever si tôt un dimanche matin. Pas humain. Plus pour moi. Plus de mon âge.
Le silence de l'appartement ne m'aide pas à me sortir de ma torpeur et je continue à avancer vers l'heure où je devrais sortir vers le metro en trainant les pieds. Au ralenti. A reculons. A reculer vers la chambre, vers le lit, vers mes rêves. Mais c'est debout que je rêve, là.
Ma réalité aussi triste que ce dimanche est de prendre le métro pour aller travailler. Et prendre le métro, un dimanche matin tôt, est un moment vraiment étrange et déprimant. Le dimanche matin marque la fin de la nuit de fête du samedi pour une partie des Parisiens. Fin de fête. Fin de soirée. Fin de ligne. Une rame de métro, à 7h00 du matin, un dimanche, est souvent remplie de dormeurs avachis la bouche grande ouverte, à deux doigts de ronfler ou de laisser couler un filer de bave, la tête en arrière dans une position vraiment peu flatteuse pour le dormeur, pénible pour le voyageur. Et il y a aussi les avinés, les saouls, les buveurs attardés. Ceux à l'alcool joyeux qui continuent à faire la fête en chantant alors que vous aspirez à un minimum de tranquilité. Ceux à l'alcool triste et morose qui pleurent parfois en se lamentant qu'ils sont les plus caliméros du monde. Et ceux à l'alcool mauvais qui cherchent querelle à tout le monde. Je ne les aimes pas ces alcoolisés, le dimanche matin. Ils me gènent et infestent mon air respirable de miasmes d'alcool mal digéré. Ce matin n'a pas fait exception : deux dormeurs et un alcool triste qui reprochait à sa copine de ne pas le comprendre; qu'il était malheureux et qu'il voulait rester seul; faire un break pour faire le point, sur lui, sur elle, sur eux et blablabla et blablabla... Pénible trajet qui me rend ce début de journée réellement insupportable.
En sortant du métro, alors que les grandes lettres bleues narquoises me faisaient des clins d'oeil écoeurants. A ce moment précis, j'avais en tête "sombre dimanche" chantée par la voix plaintive de Damia. Déprimé. A ramasser à la pelle avec les premières feuilles tombées de l'automne ou à la petite cuillère dans un ruisseau de caniveau. Pas le moral au meilleur de sa forme. Plus envie de travailler les week-end; je préfère les passer aux côtés du Sage. J'y gagne plus que ces huit heures, enfermé dans un bureau.
Mais l'heure n'est déjà plus à la plainte. Le sas du hall vient de s'ouvrir respectueusement devant moi. Le masque gris va disparaître derrière celui du bon camarade souriant. A quoi sert de tirer la tête au risque d'accentuer la morosité de la journée? Autant afficher un sourire avenant, le reste viendra en se forçant.

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