29.11.07

Danse des canards

Nouveau film de Noémie Lvosky. Comme j'avais beaucoup aimé "les sentiments", son précédent film, je m'étais dis que je pouvais aller voir celui ci sans trop me tromper. Hélas. Car il faut le dire, "Faut que ça danse" est une déception.
Pourtant la distribution et le jeu des acteurs est d'un bon niveau. Jean Pierre Marielle est excellent. Il en est de même pour Valéria Bruni Tedeschi toujours aussi pétillante. Seule Sabine Azéma, même si elle le fait bien, semble se cantonner aux mêmes rôles de film en film depuis quelque temps; personnage un peu fofolle et lunaire; drôle mais un peu agaçante à la longue. Bulle Ogier est quand à elle parfaite dans un rôle pas très facile où il aurait été facile d'aligner les clichés. Les acteurs, donc, ne sont pas fautifs.
La faute vient plutôt du scénario qui lui aligne les clichés. La vieillesse en est le thème principale. La peur de vieillir, la peur de la solitude, la peur de la dégénérescence du corps. Le regard des autres sur une personne vieillissante, son propre regard sur sa propre vieillesse. Il y a de bonnes idées comme ce désir urgent et ses difficultés de se construire une vie sentimentale après 70 ans ou bien encore le goût des claquettes du personnage de Jean Pierre Marielle. Hélas, les idées ne sont qu'effleurées sans vraiment s'y attacher. On regarde donc ce film sans vraiment s'attacher aux personnages, sans compatir réellement à leurs problèmes. Ni très attachant, ni très drôle, le film stagne à un niveau de bas étage, genre série familiale de TF1.
Il faut que ça danse dit le titre du film. J'aurais aimé que ça soit autre chose qu'un slow insipide et sans relief. Un peu comme si deux jeunes adolescents qui ne se connaissent pas mais qui se seraient forcés à danser pour ne pas faire banquette et ne pas se payer la honte devant les copains; deux personnes qui dansent sans conviction, s'échangeant des banalités cruches sur la pluie et le beau temps, tout en regardant leur montre du coin de l'oeil, guettant la fin de leur calvaire. Un pas de deux pour rien si ce n'est le plaisir de revoir des acteurs que j'aime bien.
Faut que ça danse - Noémie Lvosky

En équilibre

Jardin du Palais Royal - Paris - 25/11/2007

Once upon a time

Il était une fois, un homme un peu hirsute, un peu barbu, un peu roux, un peu bourru, un peu anglais, très irlandais. Cet homme, ours mal commode, s'avère avoir un coeur gros comme ça qu'il aimerait bien partagé. Car c'est un homme seul, célibataire depuis peu à cause que sa copine butinait ailleurs, et il souffre de sa solitude. Alors il chante. Dans la rue, dans sa chambre d'adolescent, partout, avec sa vieille guitare usée.
Il était une fois, une femme un peu espiègle, un peu mutine, un peu curieuse, un peu jolie, très peu anglaise, très peu irlandaise mais très étrangère. Cette femme est seule avec sa fille et sa mère; pourtant mariée à un homme qu'elle n'aime plus et qui vit à des milliers de kilomètres d'elle.
Il était une fois ces deux personnes qui se rencontrent dans la rue. Il joue et chante elle écoute sa solitude. Ils se découvrent la passion de la musique. Ensemble, ils vont accomplir leur rêve de musique et enregistrer un disque.
Ce film est magnifique. Une grande rasade bienfaitrice de sentiments simples et beaux. Une vague d'émotions qui nous inonde constamment. Une histoire romantique et musicale, à moins que ce soit le contraire. Ce n'est pas une love story comme les autres, bien qu'on espère à chaque instant qu'elle le deviennent tellement ces deux là sont fait l'un pour l'autre. La gaucherie du taciturne irlandais est touchante. La fraîcheur de la jeune femme fait des étincelles à chaque fois qu'elle est à l'écran. La musique, élément moteur de ce film, accompagne leur histoire comme un chaperon veillerait sur ses protégés, par de petites attentions de douceurs. Ces deux là vivent pour leur musique mais aussi à travers leur musique. Une ballade musicale et sentimentale délicieuse et délicate d'une désarmante sincérité.
Pour cette fraîcheur vivifiante, pour cette histoire simple; pour ces deux moments qui m'ont fait pleurer; pour la musique; pour le sourire que le film m'a donné pour le reste de la journée et encore lorsque je réécoute la bande originale; pour tout cela, ONCE vaut la peine d'être vu. Je ne suis pas loin d'avoir trouvé là le plus beau film de l'année 2007.
ONCE - John Carney
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27.11.07

Le grand chambardement.

Ils nous avaient dit qu'il y aurait quelques perturbations à prévoir pour ceux qui arriveraient en début de matinée. Peut-être des problèmes de places, peut-être des problèmes informatiques, peut-être même quelques soucis téléphoniques. Un déménagement ne se passent pas sans quelques petits désagréments. Mais tout devrait être normal pour 10h00 maximum. Ils nous avaient prévenu, on ne pouvait rien leur reprocher.
Vendredi, je commençais tard. Histoire de passer le temps, je suis allé au cinéma voir l'excellent ONCE. Dès la fin du film, je me suis précipité vers la FNAC la plus proche, pour acheter la bande originale de ce film qui m'avait tant accroché. Le sourire béat au lèvres (il s'agit là d'un effet secondaire du film), j'ai pris le chemin de Châtillon. Je serais en avance, c'est certain, mais au moins, je pourrais prendre mes marques dans ce nouvel environnement. Lorsque je suis arrivé sur la ligne 13 (ma nouvelle ligne de mon tiercé gagnant), j'ai été pris de drôles de pressentiments. Je ne la sentais pas bien cette journée là.
Je suis donc arrivé très tôt là bas. Le quartier est tout récent. L'immeuble qui va nous accueillir dorénavant est flambant neuf. Il est pas mal. A l'entrée, je croise un ou deux collègues qui ont l'air déconfit. Les traits tirés, la fatigue accrochée au coins des yeux. La matinée a été éprouvante. Les perturbations escomptées ont été bien pires que les prévisions estimées. Pas d'informatique, pas de téléphonie pendant deux heures, des changements de poste toutes les quatre minutes. Ça crève son chargé tout cela. Ils me disent qu'ils ne sont pas très confiants pour les heures qui viennent. Je veux être optimiste. Je veux croire que le pire est passé et que tout se passera bien pour moi. Je me doute qu'il y aura beaucoup de travail avec tous les problèmes de la matinée mais je veux que ce soit la seule raison de fatigue à la fin de ma journée.
J'entre sur mon nouveau plateau. Le moindre recoin est rempli de cartons entassés, de bureaux à l'état d'Ikéa, de poste informatiques posés à même le sol. Le grand open space bourdonne. Les gens travaillent, ça me rassure. Je récupère mon nouveau casque téléphonique, super beau. Je dis bonjour à mes collègues, tous sont exténués et me souhaite le meilleur courage possible. Ils me font paniquer. Je m'installe à un bureau. L'ordinateur met trente minutes à se lancer. Mouais ça promet. Mon cadre me fait le point sur la matinée : 3 heures au total sans téléphone, les postes informatiques sont d'une lenteur extrême et il n'y a aucun moyen d'avoir une vision sur la réalité du trafic. Glups.
15h30. Je suis enfin installé après trois tentatives sur des postes différents. Celui-ci fonctionne bien. C'est parti mon kiki. Le premier appel est houleux. Le client est en panne depuis 11h15 et comme il n'a pas réussi à nous joindre, il est toujours bloqué quelque part sur une route d'une région qu'il ne connaît pas. Je tente de lui expliquer notre situation, il s'en fout (je le comprends); pour lui, seul compte sa situation. Pendant une heure, j'ai affaire à des clients excédés par les délais d'attente. Je gère au mieux, ils comprennent tant mieux; ils ne comprennent pas, ben ce n'est pas ma priorité.
Il est 16h20. Le poste de la collègue immédiate sonne et sonne beaucoup. Je la sens interloquée. Elle me dit qu'elle a un problème avec son téléphone, elle n'arrive pas à décrocher l'appel qui sonne. Je fais le malin en lui demandant si elle veut une formation. Nous rigolons bien. Je finis mon appel et je m'occupe de son cas. Effectivement, le téléphone ne semble plus répondre. Bizarre. Au fond du plateau, j'entends une voix qui dit qu'il a perdu son appel. Puis une autre et une autre... Mon sang ne fait qu'un tour. Je regarde mon téléphone, black out. Plus rien. Nous n'avons plus de connexions téléphoniques. La nouvelle se répand comme traînée de poudre. Tous les cadres sont sur le pied de guerre; tous les directeurs sont sortis de leur bureau. Ça s'active comme dans une fourmilière qu'un gamin malicieux aurait dérangé à grands coups de pieds. Mine de rien, ce qui pourrait passer pour une bénédiction pour nous autres (après tout, être payé à ne rien faire ce n'est pas si fréquent), est en fait un grand moment de stress. Pour moi en tout cas. Il faut toujours que je me mette à la place des autres. A la place du client qui est en panne et qui n'arrive pas à nous avoir, de celui qu'on a eu mais à qui on ne peut pas envoyer d'aide... Ça me stresse
Une heure. Deux heures. Trois heures. Quatre heures. Quatre heures sans un seul appel, sans un bruit de sonnerie. Quatre heures où nous sommes complètement injoignables. Ce n'est que vers 20h30 que les lignes sont rétablies. Nous retrouvons enfin nos clients mais aucun moyen de les identifier : c'est au tour de l'informatique de jouer des siennes. La consigne est alors simple : nous assistons tout le monde.
A ce moment là nous vivons tous un moment d'angoisse. Nous allons vivre une fin de soirée de pure folie. Pour éviter la surcharge, nous créons un standard téléphonique de fortune. Pendant plus d'une heure, nous décrochons sans discontinuer. Les clients sont remontés comme jamais et comme je les comprends. Ils sont en colère et dans leur colère, ils ne comprennent pas que nous ne sommes pas responsables. Ils se défoulent sur nous. On essaie de gérer au mieux et je crois que nous avons réussi ce challenge. Les gens seront forcément insatisfait de nos services mais de notre côté, avec les moyens que nous avions à notre disposition, nous avons réussi à répondre à tous ceux qui sont parvenus à nous joindre.
A 23h30. Cette longue journée touche à sa fin. Nous sommes lessivés. Nous quittons les bureaux sans un bruit. Je n'ai jamais vu une fin de journée aussi silencieuse. Chacun n'a qu'une seule envie; celle de rentrer chez soi et de dormir. J'ai de la chance, j'ai trois jours de week-end pour me remettre de cette épreuve. Il y a des collègues qui seront de nouveau présent demain et dimanche et je n'ose même pas imaginer ceux qui travailleront lundi. Mais, j'oublie bien vite. Je veux rentrer à la maison et me réfugier dans les bras du Sage et dans les plumes de la couette.

A la porte

Le Louvre - Paris - 25/11/2007

26.11.07

Constatation # 151

Tiens ! C'est réouvert par ici !

Vivants?

Tout est gris ou terne dans ce film. Le ciel, les décors, la lumière, la peau des personnages. Tout est d'un pessimisme dépressif sur la nature humaine.
Des personnages en quête d'amour et de reconnaissance. Des personnes en état de solitude avancée; tellement avancé qu'elles ne savent pas reconnaître ou apprécier l'amour qu'on leur porte. C'est le cas de cette grosse femme qui boit pour oublier qu'elle est seule et qui pleure parce que personne ne la comprend mais qui se refuse à voir cet homme qui lui crie son amour ou cet autre qui lui offre des fleurs.
Un film sur la condition humaine où chaque personnage représente une facette de celle ci. L'amour, la haine, la colère, la joie, le regret, l'espoir, le rire, les larmes. Pourtant, l'ensemble est teinté de noir et d'amertume. A croire que le réalisateur ne croit pas vraiment en la bonté de l'humanité. Le final inquiétant laisse imaginer qu'une épée de Damokles menace ce monde incompréhensible.
Traité sous forme de scenettes, le film est assez inégal. Le côté absurde de certaine scène souligne le pathétique des situations. On sourit certes mais on grince aussi des dents. Équilibre instable entre le rire et les larmes. Espace flou entre une comédie tragique ou une tragédie comique. Le film est déconcertant et déroutant, plongeant le spectateur dans un mal être qu'on aimerait cacher en riant un peu trop fort.

Nous, les vivants - Roy Andersson

25.11.07

J de G + 8

Jeudi 22 novembre
Officiellement, aujourd'hui la grève se poursuit. Mais qu'on regarde le site de la RATP, je me rends compte que la fin est proche. Le trafic devient quasi normal partout. Seules les irréductibles persistent. Le dernier baroude d'honneur sans doute. En tout cas, la reprise est suffisamment significative pour moi pour aller au cinéma ce matin. Le retour à la normale. Enfin !
Les stations de métro reprennent leurs allures habituelles. Les rames circulent normalement. Pas d'attente, pas de foule. L'angoisse des premiers jours n'est plus qu'un souvenir.
J'arrive au cinéma à l'heure, sans avoir besoin de partir une heure avant. Comme d'habitude, 30 minutes suffisent pour y arriver. J'ai même le temps de boire un café serré au bar de l'UGC. Il n'y a personne. Ça a du être le désert par ici, pendant une semaine. Sur le tabouret à côté de moi, un visage qui ne m'est pas inconnu sirote aussi un café. Je me demande deux minutes où j'ai bien pu le voir et puis comme ça ne me revient pas, je me laisse distraire par la bande annonce du prochain Astérix. Je ris tout seul. Le visage pas inconnu est parti. Je le retrouve dans la salle de cinéma quasi vide. Là j'ai tout loisir pour me creuser la tête. Il faut dire que les publicités sont d'une pauvreté, entre la pub Orangina que je n'aime pas du tout et celle de la nombriliste et exhibitionniste Arielle Dombasle et son dvd immortalisant son passage au Crazy Horse. Je mets enfin un nom sur le visage. Il s'agit d'Yvan Attal. Ça me fait bizarre de voir un acteur si tôt dans une salle de cinéma. Mais bon, moi j'y suis bien. Pourquoi pas lui...
Quel plaisir de pouvoir reprendre ses bonnes vieilles habitudes. Aller voir un film avant d'aller travailler est un luxe inestimable pour moi. Pouvoir se caler dans un fauteuil rouge, se laisser porter dans une salle sombre vers d'autres vies. Jouer le dilettante quelques instants avant d'être rappeler par les contraintes professionnelles. Pouvoir se dire, je travaille, d'accord, mais d'abord, le réconfort. Ce matin, je me délecte encore plus que d'habitude de ce plaisir là. Une semaine que je n'avais pas mis les pieds au cinéma, à cause de ces grèves... C'est peut-être con à dire, mais ça me manquait.
A 13h00, je suis déjà dehors. Il me reste 2h30 avant de commencer ma journée de travail. Je erre quelques instants dans le labyrinthe des Halles. Comme d'habitude, ça me fatigue rapidement cet endroit. Je ressors pour aller prendre le métro. Je préfère aller passer le temps sur une terrasse de café, à Issy Les Moulineaux. Après tout, ça sera la dernière fois que je pourrais le faire aujourd'hui.
En moins d'une heure, je suis arrivé au travail (toujours en passant par le tramway). Je pose mon sac et je ressors pour mon café d'adieu. J'en profite pour acheter le nouveau CinéLive et le hors série de Télérama consacré à Barbara. Une surprise pour le Sage. Ça me fait bizarre de me dire que c'est la dernière fois que j'achète mes magasines ici; que je bois mon café là; que je fais la queue dans cette boulangerie. La dernière fois que je traînerais sur la place de la mairie. Une page se tourne...
La journée a été une horreur. Entre le boulot monstrueux (mais qu'ont-ils donc à tous tomber en panne en ce moment !) et les allers et venues des déménageurs, les tas de cartons, les changements de postes, c'est la galère. Le site de la RATP annonce que le trafic est reparti sur la ligne 12. Je pourrais rentrer en métro ce soir. Mais quand on me propose de rentrer en taxi, je l'accepte avec soulagement. Je rentrerais bien plus vite ainsi.
La grève s'achève. Je ne sais même pas ce qu'ont donné les négociations de mercredi. Ça ne m'intéresse pas plus que cela finalement. Le principal est que le retour à la normal soit effectif pour de bon. Je plie les écouteurs de mon Ipod, mon meilleur ami pendant ces longues heures de transport. De nouveau, bientôt, je pourrais recommencer à lire tranquillement pendant qu'une rame de métro m'emmènera au travail ou à la maison.
La fin de l'histoire.

24.11.07

J de G + 7

Mercredi 21 novembre
Ça fait une semaine. Une semaine de galère dans les transports. Une semaine de bras de fer entre les bases syndicales et le gouvernement. Une semaine de statu quo.
Cependant, aujourd'hui, c'est peut-être une porte de sortie aux problèmes. Les négociations commencent enfin. Bon, à 10h00, ce n'est pas très clair et très visible mais on sent poindre une petite amélioration. Toujours une rame sur 2 ou 3 en moyenne sur les lignes de métro mais toujours un trafic quasiment nul sur les lignes 12 et 8, celles qui m'intéressent le plus. Il faudra donc que j'emprunte les mêmes lignes que depuis le début de la grève.
Le soucis avec ces fins de grève mi figue mi raisin, c'est qu'on ne sait pas sur quel pied danser. Dois-je partir en avance au cas où? Dois-je reprendre mes habitudes? La situation n'est pas suffisamment stable pour que je prenne des risques. Je pars donc de la maison deux heures avant le début du travail.
C'est dans le métro que l'on voit que les choses se tassent. Beaucoup moins de monde sur les quais; beaucoup moins de monde dans les rames; beaucoup moins de stress et d'énervement visible sur les visages des voyageurs. Bon, c'est vrai que les temps d'attente sont encore un peu long mais ça reste tout de même supportable. J'arrive avec beaucoup d'avance au travail. Je sais que, demain matin, je pourrais tenter à nouveau une séance de cinéma. Enfin !
Je ne me pose plus la question pour rentrer. Un taxi m'attendra à 22h00 parce que la ligne 12 ne fonctionne toujours pas. C'est sans doute la dernière fois que je rentrerai par ce moyen là. Autant en profiter. Mais ce soir, je n'ai pas de chance. La collègue qui partage avec moi le taxi est extrêmement bavarde mais elle a un accent japonais très prononcé. Je ne comprends pas ce qu'elle me dit et je réponds souvent à côté de la plaque. Au bout d'un moment de ce dialogue de sourd, elle finit par ce taire, moi aussi. "Comment? Bonne nuit? Oui merci toi aussi !"
Mais quelle histoire !

J de G + 6

Mardi 20 novembre
Ce matin, je paresse sous la couette. Le Sage E. est parti depuis longtemps affronter la foule quand je me lève, réveillé par le coup de klaxon d'un bus. Le comble pour un jour de grève.
Je traîne et je comate. Pas de motivations, pas d'envies. Rien. Ces cinq jours de grève m'ont laissé lessivé et sans énergie. Je trouve tout de même le courage de me remettre un peu sur mon blog. Presqu'une semaine que je n'ai rien écrit. Une semaine que je ne suis pas allé au cinéma. Une semaine que je n'ai rien fait d'autre que d'aller et revenir du travail. C'est navrant. Entre deux sommes sommaires sur le canapé, je tente de m'auto-motiver pour aller au cinéma à pieds. Deux tentatives, deux faux départs. Finalement, je m'endors pour de bon, une petite heure devant le néant de la télévision allumée.
Une journée à rien faire. Ce n'est pas que je me plaigne, après tout, il faut que je me repose aussi, mais c'est tout de même triste de tourner en rond comme un rond de flan.
Dehors, les fonctionnaires défilent dans la rue pour défendre leurs emplois et leur pouvoir d'achat. Ils ne vont pas avoir chaud. J'imagine que les deux grèves cumulées vont bloquer le pays mais le Sage me dit que c'est la première fois depuis le début des grèves de transports qu'il a mis aussi peu de temps pour aller travailler (1h30 tout de même).
Le mouvement de grogne serait-il sur le point de mourir de lui même? Avant le début des grandes négociations de demain? Je n'ose pas l'espérer...
Pendant, ce temps il y a un couple qui fête royalement leur noce de diamant. Mais, ceci est une autre histoire...

23.11.07

J de G + 5

Lundi 19 novembre
Pour une fois, pas de soucis à me faire sur le comment je vais faire pour aller travailler. Un taxi passe me chercher, avec deux autres de mes collègues, à 10h40. Ça fait chic tout de même d'aller travailler en taxi. Une belle voiture gris métallisée, avec vitres fumées, portes automatiques, tablette arrière. Il ne manque plus que les deux motards à l'avant pour ouvrir la route et je me croirais presque ministre des transports. Mais, rouvrons les yeux, ce n'est qu'un taxi avec un chauffeur bavard et radoteur mais sympa. Il n'empêche que c'est bien agréable de se laisser porter comme ça.
A 11h15, je suis déjà au travail. Il me reste 45 minutes avant de commencer véritablement. Quand je vois les 50 appels en attente, je n'ai vraiment pas envie de me presser. Je vais dire bonjour aux copains et aux copines. On se raconte nos malheurs respectifs à causes des grèves. Ces salauds de grévistes qui ne font qu'embêter les vrais travailleurs. On se dit que la fatigue commence à être bien pesante. Un café, deux cafés, trois cafés. Merde, je vais être super stress au téléphone ce qui ne loupe pas d'ailleurs.
Cette semaine est la dernière semaine à Issy Les Moulineaux avant le déménagement (le grand chambardement comme on l'appelle ici). Les cartons sont arrivés. Les consignes pleuvent comme à la Toussaint. Tout doit être rangé, ficelé, étiqueté pour mercredi. Les meubles et ordinateurs seront démontés le jeudi et le vendredi, adieu Issy, bonjour Chatillon. Ça occasionne pas mal de stress finalement. Des questions pertinentes qui restent sans réponses; à croire que toute logique primaire a été perdue. Ça promet de grandes heures épiques vendredi.
En attendant, les grèves de transport continuent à faire parler. On nous annonce en début d'après midi, que finalement, il n'y aura pas de taxi retour. Tollé général. J'ai la vague impression de m'être fait avoir sur ce coup là. Du genre, je te fais un taxi pour que tu sois à l'heure et que tu bosses; tu te démerdes pour rentrer, on n'a plus besoin de toi. Ça grogne et ça grince des dents sur les plateaux. Finalement, à 17h00, on nous confirme des taxis pour le retour. Bon, ça va, mais que ça ne se reproduise pas...
20h00 est déjà là. Je suis éreinté. La journée a été dure. Le taxi m'appelle pour me confirmer sa présence. J'appelle mes collègues qui ont pris le taxi avec moi ce matin, pour leur dire de descendre avec moi. J'ai la mauvaise surprise de constater qu'ils ne sont pas au courant du taxi du soir. Je cours voir le mail de confirmation et effectivement, ils ne sont pas sur la liste des personnes bénéficiant du taxi. Trois autres personnes prennent le taxi avec moi, mais pas eux. Ça me fait gloups dans la gorge. Qu'est ce que s'est que cette histoire encore? Il y a deux poids deux mesures dans cette boite? Mes collègues reviennent vers moi avec le refus catégorique de leur cadre pour un taxi sous le bras. Ils vont devoir rentrer par leurs propres moyens. Et les moyens sont très limités à 20h00. J'en parle à mon cadre qui me dit que le principal est que j'en ai un pour rentrer. Ma vision de la solidarité en prend un bon coup dans l'aile...
Le chauffeur de taxi est du genre énervé. Il a passé sa journée dans les embouteillages et il n'en peut plus. Il râle tout le temps et après tout le monde. Le silence règne dans la voiture, ponctué de ci de là par les coups de klaxons rageurs du chauffeur. Ça roule mal. Ça n'avance pas. Je ne suis pas rentré à la maison à cette vitesse là. Il a beau prendre les voies de bus dès qu'il le peut, il reste malgré tout bloqué. Il est 21h00 et nous ne sommes qu'à Châtelet. Personne n'est encore rentré chez lui. Les essais de conversations tombent vite dans le vide. On préfère se taire. Le chauffeur bout. Sa conduite est de plus en plus nerveuse. Pourvu qu'on arrive entier...
A 21h55, enfin, le chauffeur m'arrête en bas de la maison. Deux heures pour rentrer. Je suis KO, vidée. Demain, je ne travaille pas et je vais pouvoir me reposer. Enfin ! Une seule journée. Ce n'est pas beaucoup mais il faudra bien que ça fasse l'affaire. En descendant du taxi, je croise tout ce que je peux croiser pour espérer que les grèves se soient arrêtées mercredi. Mais j'ai peu d'espoir, les négociations ne commençant que mercredi matin.
Mais pour le moment, ceci est une autre histoire...

22.11.07

Par la fenêtre

Rue Campan - Paris - 20/11/2007

21.11.07

J de G + 4

Dimanche 18 novembre
Je commence à midi aujourd'hui. Je me suis levé à 9h00. Presque 12 heures de sommeil, ça fait beaucoup de bien.
Pour garder un semblant de normalité, et pour me préparer aux trajets à venir, je prends un bon petit déjeuner avec croissants et chausson aux pommes, la total, le tout en écoutant le dernier et excellent album de Ben Ricour. Ça aide à garder le moral tout ça. Du coup, je me fais moins de bile.
Je prévois tout de même deux heures pour aller travailler. A 10h00, je suis en route pour rejoindre Belleville et prendre la ligne 2. J'avoue que sur ce coup là, j'ai de la chance. Il y a quasiment personne sur le quai et la rame entre en station à peine cinq minutes après que je sois là. J'ai même pu voyager assis tout du long. le conducteur de la rame semble de très bonne humeur lui aussi et n'arrête pas de faire des blagues potaches : "suite à mon mouvement social, je revendique le droit de vous faire sourire" ou encore "la dame rousse de la voiture du milieu est priée de s'accrocher; je vais freiner". Ca surprend mais c'est agréable.
Le schéma se répète sur la ligne 1. Dix minutes d'attente seulement et tout le voyage assis, mais sans le comique de service. Au final, j'arrive à Issy-Les-Moulineaux à 11h25. Je suis presque de bonne humeur. La journée de travail est plutôt tranquille. Ça fait du bien.
Vers 15h00, on m'annonce qu'on nous met à disposition un taxi pour rentrer ce soir. En plus, on nous organise aussi un taxi pour venir travailler le lundi matin et un autre pour rentrer le lundi soir. C'est l'euphorie, là. Merci patron...
Un taxi m'attend à 20h00. Il dépose deux de mes collègues dans le centre de Paris et à 21h15, je suis à la maison.
Dans ces conditions là, les grèves ne me font plus peur. Pour fêter cela, c'est double dose de Martini rosé et Pizza Hut. C'est la fête. Pas de stress du lendemain. Tout est bien. A 22h30, je suis au lit. Pas de mauvais rêves cette fois ci.
Est-ce la même histoire?

Place des Fêtes

Place des Fêtes - Paris - 20/11/2007

20.11.07

J de G + 3

Samedi 17 novembre
Dès que le réveil sonne, je saute du lit. J'ai déjà une boule dans le ventre. Je suis obnubilé par l'idée d'arriver en retard au travail. Je déteste cette idée là surtout quand je ne maîtrise pas tous les éléments. Je consulte le site RATP qui annonce une rame sur cinq, sur l'ensemble du réseau, sauf la ligne 6, la ligne 8 et la ligne 12. Il ne me reste plus qu'à tenter le même itinéraire que le jeudi matin. On est samedi matin, il devrait y avoir beaucoup moins de monde sur les quais.
A 6h25, je suis dehors. Je viens à peine de passer les tourniquets de la station, qu'une voix morne annonce que "suite à un mouvement social, le trafic est totalement interrompu sur la ligne 7bis et la ligne 11. Veuillez nous excuser pour la gène occasionnée". A ce moment là, j'ai vraiment envie de lui occasionner plus que de la gène à la voix morne. Je me précipite dans la rue et je marche. J'avoue qu'à ce moment là, je ne savais pas trop pourquoi et où je marchais. La panique totale.
En respirant un bon coup, il a fallu réfléchir. Bon, je suis à Jourdain, je n'aurais pas d'autre solution avant Belleville où je pourrais récupérer la ligne 2. Je sais enfin pourquoi je marche. Mine de rien, ça rassure. Il fait encore bien froid ce matin. J'ai les doigts gelés. C'est la faute à Sage E. ça aussi; il a oublié mes gants de laine marron dans la voiture de sa collègue jeudi soir. Mais bien vite, le froid se fait oublier. Marcher vite donne chaud même par le froid le plus canard. Je ne vois rien défiler. J'ai mon objectif au coin de l'esprit et je ne vois rien d'autre; pas même les éboueurs. Je vois passer des taxis tous occupés, ma solution de replis, mon atout de dernière minutes me semble bien compromis aussi.
Belleville enfin. Je regarde le portable, j'ai descendu tout cela en 10 minutes. Je ne m'étonne plus que mon coeur cogne comme un malade. Je descends dans la station et je vois que l'accès à la ligne 2 est barrée. Pas de métro non plus ici. J'ai bien cru que j'allais chialer de dépit. A cet instant là, je maudis les grévistes jusqu'à la cinquième génération. Mais les maudire ainsi ne me fait pas avancer plus vite. Il faut que je trouve une autre solution rapidement. Je cherche un taxi, il n'y en a pas. Je continue donc à marcher vers République que j'atteins assez rapidement sans voir de taxi libre. A une entrée de métro, je vois un gars énervé qui me lance que je perds mon temps, il n'y a pas de métro qui fonctionnent à cette station. Je vais marcher jusqu'où comme ça? Je ne vais tout de même pas devoir marcher jusqu'à Issy-Les-Moulineaux tout de même.
Je tente à nouveau l'option taxi. Il n'y en a pas. Enfin si, j'en vois un, là bas, qui s'avance vers le feu rouge. J'accélère le pas pour essayer de l'avoir mais il y a quelqu'un qui a le bras plus rapide que moi. Et fiente de pigeon parisien ! J'en ai marre, marre et marre. Je décide de rester un peu à faire le planton à ce feu rouge. Je suis tout de même place de la République, à Paris. Il va bien y avoir un taxi qui va finir par passer. Le problème, c'est que je suis en sueur d'avoir marcher si vite et j'ai oublié qu'il faisait très froid. Je commence à grelotter très vite.
J'avoue que j'ai pensé à ce moment là, à faire demi tour et rentrer à la maison. Et puis je me suis dit que j'avais pas marché autant; je ne m'étais pas levé si tôt; je n'avais pas fait tout ça pour renoncer maintenant. Non ! Certainement pas. Je reprends donc mes pieds à mon cou pour aller vers Châtelet.
J'ai dû marcher jusqu'à Arts et Métiers avant de voir mon premier taxi disponible. Malgré mes signes, celui-ci ne s'est pas arrêté. Ce n'est qu'en m'engageant dans la rue de Beaubourg que la chance (?) me sourit. Un taxi s'arrête pour déposer son client. Je me précipite vers lui pour prendre la place. Ce dernier accepte la course. Il est alors 7h20. J'ai donc une chance de ne pas arriver en retard.
Et effectivement, vingt minutes après, je suis déposé à Issy-Les-Moulineaux. Je règle les onze euros de la course (qui ne me seront pas remboursé !). Je suis à l'heure, c'est le principal.
Le retour a été plus tranquille. je sais simplement qu'il faut que j'évite la ligne 11 qui où le trafic est quasiment nul. Le tramway, la ligne 1, la ligne 2 et enfin la ligne 7bis et me voila à la maison. Les rames sont vides, à part quelques touristes égarés. C'est agréable quand il n'y a personne. Il m'aura fallu tout de même 1h30 pour rentrer. J'arrive à la maison, je suis exténué. Le Sage me propose de regarder un dvd, histoire de me destresser un peu. Il n'empêche qu'à 21h30, je m'endors sur le canapé. Pour la première fois de ma vie parisienne, je suis couché à 22h00. Je rêve de métro. Je rêve que je me retrouve dans une station au milieu d'une ville où il y a la mer. Il n'y a rien à part des gens étranges. Je vois des arcades en briques à n'en plus finir; des ascenseurs qui ne mènent nul part et j'entends des voix qui annoncent que c'est la merde.
Mais cela, est-ce une autre histoire?

J de G + 2

Vendredi 16 novembre
6h00. Le réveil sonne. Je n'ai pas assez dormi. Je n'ai pas envie de me lever.
Le journal de France Inter annonce une nouvelle journée perturbée pour les Franciliens. Ils commencent à nous gaver ces grévistes.
Le rendez-vous est à 7h00. On doit être cinq personnes à partir travailler ensemble. Il fait super froid ce matin mais tout le monde est là et à l'heure. Il fait bon dans la voiture. Je me laisserais bien partir, à nouveau, dans les bras de Morphée, mais ça ne se fait pas. Alors je lutte. J'écoute le babillage sans grand intérêt de mes collègues et puis j'écoute les bêtises de Cauet à la radio. Il me fait toujours rire ce pitre là. Ca me replonge loin dans le temps quand il animait déjà les matinales de Fun Radio. J'étais à la Fac.
Le voyage se passe étrangement bien. La merde habituelle dans la rue de Belleville avec ses célèbres camions en double fil de chaque côté de la rue. Mais une fois ce noeud passé, la route est fluide jusqu'au quais de Seine où le trafic s'intensifie un peu plus. Dans moins d'une demie-heure, ça sera beaucoup moins plaisant de rouler ici. Sur le bord de la chaussée, des gens font du stop et des voitures s'arrêtent. La solidarité existe belle et bien encore? La vision apocalyptique des stations de métro, la veille, avec tout ce monde énervé et agressif qui n'aurait pas à hésiter à sortir une personne de la rame histoire de prendre sa place, m'avait laissé une sorte d'amertume et une vision bien pessimiste sur l'avenir du genre humain.
7h40. Les mêmes néons bleus, la même nuit qu'hier. J'ai l'impression de ne pas avoir quitter le bureau; j'ai l'impression que je passe ma vie ici. C'est assez déprimant cette sensation. Mais bon, un café avec un croissant, juste avant de commencer la journée, ça remonte pas mal le moral. Finalement, ça a aussi des bons côtés les grèves.
A 16h00 tapante, on me rappelle qu'il est l'heure de partir. Pourtant, la fluidité du voyage aller ne se représente pas. Tout est bouché. Le périphérique, les voies sur berge, les boulevards maréchaux. Il y a de la voiture partout. Des klaxons tonitruants. Première, deuxième vitesse. Des rubans rouges de feux stop à l'infini. Il nous faut 2h30 pour rentrer. Il nous a fallu 45 minutes, rien que pour passer le Louvre. Pour passer le temps, je textote avec le Sage qui me dit de descendre à Châtelet et de l'attendre là. J'en ai bien envie, tellement j'ai les pieds engourdis mais ça ne se fait pas. Alors je me force et je reste.
Pourquoi avoir pris par les quais aussi, on aurait plus vite fait, en passant par Opéra et Lafayette. Mais le copilote me dit non ! C'est mieux par les quais. Je me tais et je patiente. Je fredonne dans ma tête pour faire passer le temps.
Le soir, pendant le dîner, je m'inquiète de la reconduction du mouvement pour le lendemain. Je commence déjà à me lamenter de devoir me lever super tôt pour aller travailler. Car demain matin, il n'y aura pas de co-voiturage. Le Sage E. ne voit pas pourquoi je devrais subir les conséquences de cette grève et me dit qu'à ma place il se lèverait à l'heure habituelle. Je ne suis pas de son avis en arguant que je ne veux pas les laisser m'empêcher d'aller travailler. Ebouriffage de tête, comme cela arrive parfois ! Mais cela est une autre histoire...

J de G + 1

Jeudi 15 novembre.
Le site de la RATP l'avait dit : à la demande des syndicats, le mouvement social a été reconduit pour le jeudi 16.
Bon, ben là, il n' y a pas à dire, pas à faire, cette fois ci, je suis concerné. LA poisse commence. La bonne nouvelle, c'est que je commence le travail à 14h00. La mauvaise nouvelle, je finis à 22h00. Pas ou peu de trafic sur la ligne 4 et la ligne 12 est fermée. Forcément...
Après une consultation au sommet avec le Sage pour choisir la meilleure option possible pour aller à Issy les Moulineaux, je me suis engouffré dans l'antre d'un autre monde. Il était à ce moment là, 11h45. Le trajet retenu est de prendre la ligne 11 jusqu'à Hôtel de Ville où je récupère la ligne 1 jusqu'à La Défense,son terminus et de là prendre le tramway d'un bout à l'autre.
Arrivé sur le quai de Place des Fêtes, un Sage conseil me revient en tête : "si dans la rame tu veux survivre, ni au début ni à la fin tu te mettras". Je me place donc au centre du quai et j'attends... J'attends... J'attends 20 minutes qu'une rame daigne enfin pointer le bout de ses phares. Pendant tout ce temps une voix blanche et nasillarde dans un micro nous intime l'ordre de ne pas aller sur la ligne 7bis qui est complètement fermée. Toutes les 30 secondes, le message nous saoule les oreilles. Une grave envie d'étrangler quelqu'un commence à poindre dans mon esprit.
Effectivement les premières voitures sont archi-bondées alors que celles du centre sont encore accessible. J'entre dedans sans problème et me cale dans un coin où je ne serais pas trop écrasé si cela arrivait. Mais jusqu'au changement j'ai pu respirer à mon aise. Par contre, vu le temps passé à chaque station, je n'ose même pas imaginer ce qui se passe dans les voitures avant. Des gens qui n'arrivent pas à sortir ou des gens qui n'arrivent pas à entrer et qui forcent pour arriver à leur fin au milieu des cris des autres... Non je n'ose pas l'imaginer. C'est bien pire, je vais le vivre.
La ligne 1. Direction la Défense. Il y a beaucoup plus de monde. La prochaine rame est annoncée dans 15 minutes. Pendant tout ce temps, le quai se remplit de plus en plus. Le conseil du Sage toujours en tête, je me mets en milieu de quai. Mais ce qui vaut pour la 11 n'est pas vrai pour la 1. La rame est bondée. Des joues sont plaquées sur les vitres des portes et me font penser à des méduses gélatineuse échouées sur une plage normande et écrasées par des gamins. Trois ou quatre personnes sortent comme elles le peuvent de la voiture, vingt autres veulent y entrer. J'y rentre sans trop de difficultés mais je suis poussé voir déséquilibré par les autres. J'ai la drôle d'impression d'être une cacahouète dans un son sachet sous vide. Une petite mamie chétive se tient à mon bras, pendant quelques secondes, pensant sans doute y trouver une accroche solide. La pauvre, elle disparaît assez rapidement de ma vue. Mais un solide gaillard lui servira de rempart bien plus efficace que moi. La rame quitte la station. Enfin. Je suis dedans, je vais pouvoir arriver là où je veux. Chaque station est un éternel recommencement. Bousculades, cris, le chacun pour soi, les pieds écrasés, le manque d'espace vital avec mon compagnon de fortune. Des personnes se sont mises debout sur les sièges de la rame. Le voyage me parait durer une éternité. Lorsque les portes s'ouvrent enfin sur les quais de La Grande Arche de la Défense, un souffle de soulagement envahi tout le monde. Pourtant, pour moi, le périple ne s'arrête pas là.
Heureusement, le tramway fonctionne normalement. je n'attends qu'une minute et me voici en route pour Issy. Trente minutes reposantes de transport dans la banlieue chic. De beaux immeubles, de belles villas, le parc de St Cloud et ce qui reste du château, le musée de Sèvres... Je me laisse bercer par les légères secousses du train. Je suis vidé; plus aucunes forces (heureusement que je suis en cure Juvamine en ce moment). Mon état de stress se calme d'un coup et me plonge dans un état de somnolence. Si je me laissais aller, je crois bien que je pourrais m'endormir. Mais le but final arrive vite. Je n'ai jamais été aussi heureux d'arriver au travail. Il est 14h00. Il m'aura fallu 2h15 alors qu'en temps normal il m'en faut 45 minutes. Une pensée m'abat le moral pourtant : et ce soir, comment je fais moi?
Toutes les heures, je regarde défiler les bulletins d'information de la RATP et ça ne va pas en s'améliorant. En milieu d'après midi, on me poropose un co-voiturage pour le lendemain pour un depart à 7h00. J'hésite. Je finis à 22h00. Quand vais-je pouvoir dormir? J'ai l'accord de la dircetion. Bingo ! Demain au moins, je ne prendrais pas le métro. A 20h00, le trafic est quasi bloqué sur toutes les lignes. Ma boite à imagination commence à me dessiner son scénario le plus noir et je me voyais devoir traverser Paris à pieds pour rentrer. J'en touche un mot à mon cadre qui finit par me lâcher un taxi pour le retour. Soulagement. Je respire. Un tracas de moins. Merci patron.
Il est 22h00. Le taxi est bien là comme prévu. Il roule comme un sagouin, m'obligeant souvent à serrer les fesses et à fermer les yeux. Mais cela est une autre histoire...

19.11.07

Jour de grève

Mercredi 14 novembre.
C'est la grève. Encore une fois. Suite à un mouvement social, le trafic est très perturbé sur le métro, les bus et les RER. Ne parlons même pas des trains de la SNCF. Lorsqu'on entend "très perturbé", il faut comprendre qu'il n'y a quasiment pas de transport. Il faut alors imaginer les scènes de folie pure sur les quais des stations de métro. Il faut aussi imaginer les kilomètres de bouchons en région parisienne.
Le Sage E. a trouvé une solution pour ce matin. Un collègue l'attend pour l'emmener au travail en voiture. Le co-voiturage va sauver pas mal de situations délicates. L'inconvénient c'est qu'il faut qu'il se lève à 6h00 pour pouvoir véliber jusqu'à pas loin de Bastille. Et il n'aime pas ça, se lever tôt.
Moi, j'ai une chance relative, je ne travaille pas aujourd'hui. Je ne serais pas directement impacté par tout cela. Bon, évidement, ça m'empêchera d'aller au cinéma (je ne pourrais donc pas aller voir ONCE) mais s'il le faut, je peux toujours aller à pied jusqu'au MK2, à côté de Jaurès.
En jetant régulièrement des coups d'oeil sur la place des fêtes, je vois que l'arrêt de bus se remplit de plus en plus. Tout ce monde qui attend dans le froid (tant qu'à faire, le froid fait des siennes aussi) ! Je me demande bien comment toutes ces personnes vont pouvoir rentrer dans un bus qui ne passe qu'une fois par heure. Les fous. Les pauvres.
Ce soir, nous avons un spectacle, dans le cadre d'un abonnement pour 10 personnes, au théâtre des Abbesses. C'est un spectacle de Shantala Shivalingappa, une danseuse indienne que nous aimons bien. Il va y avoir du désistement. Déjà, le 14ème ne viendra pas dans le 18ème. Je refuse de me laisser pourrir ma vie sociale par des égoïstes. Je ferais les presque 5 kilomètres à pied. Il fait vraiment froid à 18h00. Je regarde tout de même si les bus fonctionnent, histoire de me rapprocher un peu, mais je vois toujours une trentaine des personnes qui attendent l'arrivée d'un hypothétique bus. J'espère seulement que ce ne sont pas les même personnes qui attendent depuis le matin.
Il fait nuit. Il fait froid. Les passants marchent vite, la tête baissée, pressé de rejoindre la chaleur de leur maison. Les voitures n'avancent pas, pare choc contre pare choc, et le klaxon consciencieusement enfoncé. C'est la cacophonie. Je marche moi même vite, pour oublier le froid. J'ai pourtant le temps mais il faut bien que je me réchauffe. L'itinéraire bien en tête, j'avance sans regarder autour de moi, complètement abasourdi et désorienté par le bruit. Le boulevard de la Chapelle n'est que bruits et fureurs. Klaxons, sirènes et bruit de foules réussissent à me faire perdre mes repères et me plonger dans un étrange malaise.
Heureusement, j'arrive très vite rue d'Orsel. La rue des Abbesses n'est plus très loin. Les bruits de circulation du boulevard ne sont plus qu'une vague rumeur. Je m'installe à une table de la terrasse du Café St-Jean, sous une lampe chauffante. J'ai bien mérité mon demi de bière après cette heure quinze de marche. Le Sage E. et Dame A. sont bloqués dans les bouchons. Une autre Dame fait le chemin à pied; tandis qu'un autre est enlisé dans le magma humain d'une station de métro. Une autre encore pédale, pédale sur son nouveau vélo bleu. Le 14ème ne se risque même pas à venir. Christophe Alévêque se fait courser dans la rue par un serveur. Mais cela est une autre histoire...

16.11.07

Je me demande..

Vous iriez voir, vous, un film qui donne ce genre de réaction aux spectateurs?
Ben ne comptez pas sur moi !

Rec. de Palco Plaza & Jaume Balaguero (sortie avril 2008)

14.11.07

Allons enfants de la patrie...

Un jeune soldat est porté absent dans sa caserne, suite à son retour d'Irak. Peu de temps après, son corps est retrouvé près de la base militaire. Son père, ancien de la Police Militaire pétri de rigueur et de droiture ankylosante, va mener l'enquête pour tenter d'élucider ce meurtre. Il découvre alors ce que la guerre a fait à son fils.
Ce film sonne comme un réveil des consciences; une remise en place du patriotisme américain. Il s'agit d'un message qui dirait "citoyens voyez comme l'Amérique a mal à sa jeunesse qui est tourneboulée par la guerre en Irak". Le réalisateur veut montrer que l'Amérique va mal depuis le début de ce deuxième conflit avec l'Irak. Ce n'est pas toujours fait très finement (un drapeau étoilé à l'envers, une bannière déchirée...) mais le message est là. On devine à demi mot une critique de la politique Bushienne mais sans pour autant remettre en cause la guerre qui ravage la jeunesse américaine. On nous montre en images sales la vie d'un soldat là bas. On nous démontre que ce conflit à de graves conséquences psychologiques sur les GI's mais à aucun moment on ne remet en cause la légitimité de cette sale guerre.
Réalisé avec une très grande rigueur et avec éclats de genre qui n'apporterait rien à l'histoire, le film est aussi un concentré émotionnel. Intense. On le doit avant tout à une belle brochette d'acteur et d'actrices magnifiques. Tous ces rôles sont taillés pour remporter un Oscar. Susan Sarandon, malgré la petitesse de son rôle, est magnifique dans son rôle de mère frappée par la mort de ses enfants. Charlize Theron, que je vois pour la première fois dans un film, est elle aussi très bien dans son rôle de policier qui doit s'imposer malgré tous les doutes qui l'assaillent, face à une bande de machos. Et puis, il y a le monument Tommy Lee Jones. Impeccable. Le visage froid et fermé, un jeu monolithique mais qui fait passer des émotions incroyables rien que par un petit geste simple et insignifiant ou une intonation de voix. A coup sûr, ce rôle lui vaudra le titre de meilleur acteur 2007.
Dans la Vallée d'Elah - Paul Haggis

13.11.07

Dessein contre dessin



Quelle est la différence entre cette armoire de la fin du 17ème siècle, cette armoire de 1951 et cette dernière datant de 2006?
La finalité est la même pour ces trois meubles. Elle n'a pas changé d'une époque à l'autre. Alors, elle est où la différence? Elle est dans la forme, dans le volume, dans les matières, dans le décorum. La différence est dans le design du meuble.
Bon ben d'accord, c'est bien joli cette histoire de design. Mais c'est quoi le design? Je ne ferais que reprendre cette définition : "Il n'existe pas de définition unique du design. Son sens varie selon les époques, les cultures et les individus. Pour les anglo-saxon, le design est davantage une conception, une idée, une intention ou un projet. En français, c'est une recherche d'harmonie entre les formes et les fonctions de l'objet. En Italie et en Allemagne, le design est nettement plus stratégique puisque l'industrie et l'artisanat de qualité en on fait leurs credo pour valoriser leurs productions".
Ça n'est pas plus clair, n'est ce pas? Alors il faut aller voir l'exposition que lui consacre le Grand Palais en ce moment et jusqu'à début janvier. Il s'agit d'une petite exposition didactique qui met en comparaison différents meubles et objets selon les époques, selon les visions, selon les créateurs. Pas toujours très fonctionnels et pas toujours très jolis (mais ça, les goûts et les couleurs comme dirait Maman Jo), ces objets sont pourtant tous des pièces d'art. On a même trouvé que deux ou trois de ces objets auraient toute leur place dans notre appartement comme une magnifique lampe en suspension composée de tessons d'assiettes blanches.


Exposition Design contre Design - Le Grand Palais

Par l'Eire

Tout à l'heure, je regardais sur mon portail cinéma préféré, la bande annonce de ONCE, un film irlandais qui sort dans les salles le 14 novembre. Le film qui a donné suffisamment d'inspiration à Steven Spielberg pour le reste de l'année (souhaitons le lui pour qu'il ne nous déçoive pas avec Indianna Jones IV).
En voyant ces quelques images de Dublin et de l'Irlande, j'ai eu comme une envie soudaine de partir là bas.
Crédit Photo : Max Sauter

Beautiful Days

Pour oublier qu'il fait froid.
Pour oublier le camaïeu de gris du ciel parisien.
Pour oublier les grèves qui s'annoncent pour les prochains jours.
Pour oublier les heures de galère dans les transports.
Pour oublier que la vie est parfois bien déprimante.
Pour se mettre des oeillères et ne pas voir demain.
Pour continuer à croire que la vie est belle.
Pour se laisser bercer aussi par le rock puissant et mélancolique de Vénus.
Pour écouter Beautiful Days
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11.11.07

D'une ligne à l'autre

Je ne m'attendais pas à ce genre de film en allant voir 99 F, le film tiré du roman éponyme de Frédéric Beigbeder. C'est d'ailleurs une des raisons qui m'a fait aller voir le film si tardivement. Je pensais voir une comédie azimutée sur les rouages d'une boite de publicités. Mais c'est loin d'être cela. C'est un film au contraire dépressif et salement pessimiste.
Octave est une pointure dans l'art de faire vendre. Son rôle est de transformer le plus anodin des produits en produit indispensable pour la ménagère de moins de 50 ans. Il est publiciste. Comme il est bon, il roule sur tous les excès : la drogue, l'alcool, les filles, l'argent facile et à foison. Constamment dans les vapeurs de cocaïne et de champagne, il se prend pour le roi du monde. Pourtant, Octave est à un tournant de sa vie. Il a des doutes sur sa place dans la société. De doutes en dépression, il n'y a qu'un pas, qu'Octave saute en plongeant les pieds devant. Il se rend compte que sa vie n'est que du vent, son métier qu'un ramassis de mensonge et qu'il est le roi des merdes. Il a laissé filer la fille qu'il aimait, ses compétences artistiques sont remis en cause par un client roi.
Un portrait au vitriole du monde de la pub et de ses coulisses pas toujours très glorieuses. Jan kounen n'y va pas de main morte dans l'adaptation du roman de Beigbeder (qui apparaît à deux ou trois reprises dans le film). Le film suinte le cynisme à chaque image dans les portraits de toutes la faune qui entoure le monde de la publicités. Du collaborateur puant du client au big boss de la boite en passant par tous les parasites au consommateur qui se laisse volontairement berner par la publicité. Chacun en prend plein la gueule.
Filmé sous substances hallucinogènes, il regorge de moments déjantés. Ce film n'est pas sans rappeler (toute proportions gardées et avec une finalité différente) le Las Vegas Parano de Terry Gilliam, dans les délires liés à la consommation de drogues dures. Mais c'est aussi et hélas une des limites un de ce film car on se perd très rapidement sur le sujet principal du film : film critique sur le monde de la publicité et de la sur-consommation ou film sur les ravages déléristiques et auto-destructeurs de la consommation à outrance de drogues?
Jean Dujardin incarne avec conviction un Octave dépressif, borderline. Il n'est pas du tout sympathique mais au final, il n'est pas, non plus, complètement antipathique. Un mélange de cynisme pédantisme outrancier; de je-m-en-foutisme et d'arrogance à vomir. Bon sang que je n'aimerais pas avoir sa vie.
Pour passer le temps...
99 Francs - Jan Kounen

8.11.07

Ma vie de chien

Je passe mon temps de promenade, la truffe au raz de l'asphalte, à renifler le passage de mes congénères qui passent leur temps de balade à me voler mon territoire. Chaque nouvelle sortie est l'occasion de marquer chaque arbres, chaque poteaux, chaque poubelles, chaque roues, qui jalonnent mon espace. Je lève la patte donc je suis comme me disait mon père quand j'étais tout chiot. Depuis que j'ai quitté le chenil familial, je m'applique à me faire respecter de tous mes rivaux. On ne m'avait pas dit que ça serait un travail de tous les instants. Je ne prends plus le temps, comme quand j'étais avec tous mes frères et mes soeurs, de m'amuser. De toute façon, s'amuser seul, ça n'est pas très drôle.
Et puis, il faut bien que je sorte mon humain. Il resterait cloué chez lui celui là si je ne lui forçais pas la patte. Trois à quatre fois par jour, je l'habitue à se dégourdir l'arrière train. Parfois, il rechigne mais j'ai mis au point une technique imparable. Il suffit que je lève la jambe pour qu'il sorte fissa avec moi sur ses talons. Il ne doit pas aimer que je marque sur son beau tapis tout neuf.
Il est étrange mon humain. Je me souviens, je lui avais fait les yeux doux à travers les barreaux de ma maison. Il a poussé des cris d'enfants qui beuglent. Il m'a pris dans ses bras et il m'a caressé partout. J'ai bien aimé ce moment là et je grogne de plaisir à chaque fois qu'il recommence. J'étais bien dans ses bras là. Il faisait chaud comme quand j'étais contre le ventre de ma mère. Ça n'a pas duré longtemps. Très vite, il m'a mis un sorte de grande tige molle qui sent la vache synthétique et c'est devenu un rituel : dès que je le fais sortir, il m'entoure le cou de cette tige là. Il doit avoir peur de se perdre; ça doit être un moyen pour que je le guide. Moi, je n'aime pas trop ça. Je ne me sens pas très à l'aise avec. Et puis parfois, mon humain, il me tire dessus. Il est très impatient quelques fois, alors que je préférerais flâner et prendre mon temps. Ça lui ferait du bien à lui aussi. Il est très nerveux parfois.
Au début, on a passé comme un accord. Il m'a dit ce que je ne devais pas faire. Je lui ai dit ce qu'il ne devait pas faire. Ça se passait super bien. Une belle époque; la belle vie. Au début, il acceptait que je le protège même quand il dormait. Je me mettais alors dans son panier et je veillais pendant qu'il ronflait. Puis un jour, il y a un autre humain qui a pris ma place. J'ai protesté en grognant tout ce que je savais. Il aurait pu faire mal à mon humain mais il n'y a rien eu à faire. Il m'a fermé la porte à la truffe et depuis je dors, l'oreille toujours dressée, dans le couloir, toujours prêt à le secourir. Je me méfie de cet autre humain. Depuis qu'il est dans cette place, mon humain grogne étrangement la nuit. Comme si il avait mal. Un jour, je me suis presque jeté sur l'autre. Il était sur le dos de mon humain qui grognait très fort. J'ai bien failli lui attraper la patte arrière. Mais mon humain m'a renvoyé comme un vulgaire chat de gouttière. Qu'il se débrouille avec l'autre. N'empêche que depuis qu'il là celui là, je n'ai plus le droit aux caresses sur le canapé quand du temps où mon humain regardait la fenêtre bleue du salon.
J'aimais bien cette époque là. On partageait des morceaux de sucreries. J'avais ma tête sur ses grandes pattes et il me grattait derrière les oreilles; parfois, on s'endormait et on se réveillait en pleine nuit. Il arrivait même que je le sorte à ce moment là, histoire de bien le réveiller. J'aimais ça moi, me promener avec lui la nuit. Il n'y avait pas de bruit. parfois je grognais quand je sentais un chat. Ça le faisait rire. Quand j'y repense...
Maintenant, j'ai ma pâtée dans la cuisine. Je n'ai plus le droit aux sucreries sur le canapé. je n'ai même plus le droit au canapé. L'autre a pris la place. On ne sort plus jamais la nuit, tous les deux. On ne sort presque plus jamais tous les deux d'ailleurs. L'autre est souvent là. Ils marchent vite et j'ai plus le temps de rien. J'ai remarqué qu'il y a un labrador qui a des visées sur mon territoire. Il faut qu'il fasse gaffe à son museau ce cabot là. Mais, ils ne me laissent plus marquer. Ils grondent à chaque fois. J'ai le droit encore sur les poteaux mais plus rien sur les arbres ni sur les roues. Quand je balade mon humain avec l'autre collé à son arrière train, comme sur une chienne en chaleur, je n'ai plus le droit de prendre certaines de mes allées. Maintenant, ils me font marcher sur des territoires ennemis. Je me suis risqué à marquer, histoire d'agrandir mon territoire mais il y a un gros balaise qui m'a aboyé méchamment dessus. je ne m'y risque plus.
L'autre a une salle influence sur mon humain. Il l'oblige à s'habiller comme lui. C'est d'un ridicule. Mais l'autre jour, c'est vrai qu'il faisait pas bien chaud, mais l'autre m'a mis une sorte de choses a fourrure sur le dos. Un manteau qu'ils ont appelé ça. Ils m'ont obligé à les sortir avec ça dans la rue. Mes grognements n'y ont rien changé. La honte. Je suis grillé à vie dans le quartier. J'ai bien vu le labrador qui ricanait.
Je n'ai plus envie de le sortir. Il m'ennuie mon humain. Je préfère rester sur mon tapis. J'y passe d'ailleurs quasiment toutes mes journées maintenant. Les trois ou quatre sorties sont devenus plus que deux par jour. Maintenant mon humain sort avec l'autre. Je ne l'aime vraiment pas celui là. Maintenant, ma vie c'est ce petit territoire où je me renifle à chaque coin de porte. Je passe de la cuisine et mon écuelle, au salon et mon tapis. Je m'ennuie. Il m'arrive de plus en plus de rêver de mes frères et soeurs; de mon père et de ma mère. Je n'ai pas l'impression qu'ils s'ennuyait eux. Je me rappelle les longues courses en criant tout ce que nous savions dans le grand jardin. Une autre époque. Je crois que j'envie un peu mon père, parfois. Ça doit être bien d'être père. Mais je n'ai pas trouvé la chienne de ma vie. Il y a bien celle de l'humain d'en haut mais elle est trop bêcheuse. Jamais elle ne m'a regardé.
Je déprime. Je le vois bien, j'ai mon poil qui ternit. Il s'en va en grosses touffes qui se collent au tapis. Il fait nuit. La fenêtre bleue du salon n'est pas allumée. Mon humain n'est pas rentré. Hier non plus. Je n'ai plus rien dans ma gamelle. Il me reste un peu d'eau. Je me recouche sur le tapis en soupirant. Je me rappelle une chanson humaine qui parlait de son compagnon. Je guide tes pas, elle disait cette chanson. Je suis bien sûr que cet humain là ne me traiterait pas comme ça. Le mien, il ne m'a jamais écrit une telle chanson.
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Les couleurs du Perche

Étang de la Herse - Orne - 04/11/2007
Se sentir ailleurs d'un simple coup d'oeil. L'impressionnante impression d'être beaucoup plus loin que l'endroit où l'on est sensé être. Une vague illusion de grand espace canadien. Le temps d'une balade, le Perche prend ses grands airs de Québec. Ses belles étendues, à peine éclairées par un faible soleil, deviennent de larges paysages en panoramique et cinémascope qui appellent au calme et au repos. Des paysages qui se teintent d'une douce mélancolie qu'on aimerait emporter avec soi, dans un coin de sa mémoire, juste en fermant les yeux pour l'imprimer sur les rétines.
La bataille des couleurs fait rage : les bruns contre les ocres; les rouges contre les jaunes. Des tapis de feuilles transforment les chemins et les routes en longs tapis cérémonieux moelleux, sur lesquels on n'osent à peine marcher. L'air s'enivre des saveurs acres et acides des chemins de terre gorgés d'automne. Le reflet des grands arbres flamboyants se révèle sur la surface opaque et troublée d'un petit étang de forêt. Les petites bourrasques de vents transforment le ciel en vaste espace de fêtes, emportant les feuilles mortes comme de petits confettis qui tourbillonnent dans de longues farandoles dorées.

Le bâteau coule

Ce n'est certes pas le meilleur Woody Allen que j'ai pu voir. Je préfère largement ses comédies à ses films plus dramatiques. Même si en l'occurrence la touche humoristique du réalisateur est encore visible ici, mélange de situations absurdes et de dialogues savoureux. Même si encore on retrouve certains de ses thèmes qui lui sont chers comme les marques de la culpabilité.
Le jeu des acteurs est encore une fois exceptionnel. Ewan McGreggor prouve encore une fois qu'il est l'un des meilleurs acteurs de sa génération, tour à tour charmeur un peu roublard et inquiétant dans ses instincts les plus sombres. Même Colin Farrel qu'on connaît plutôt bourrin et sans finesse dans ses rôles précédents, est ici d'une justesse sidérante; une sorte d'ours mal léché et au grand coeur qui pète les plombs devant la direction que prend sa vie.
En mêlant à son récit noir et pathétique sa patte d'humour à froid et de cynisme, Allen perd de vue la noirceur et le drame de son histoire. A sujets presque identiques, le film de Sydnet Lumet est beaucoup plus fort car il se garde bien "d'enjoliver" par des effets de style la noirceur de son histoire et de ses personnages. Woody Allen semble vouloir s'éloigner de ses comédies pour prendre un tournant plus dramatique mais on sent qu'il n'est pas encore tout à fait sûr ou prêt à faire le grand saut; qu'il s'accroche encore à ce qui à fait sa patte en l'adaptant à des genres qui n'en ont pas besoin.
Reste que Allen demeure un excellent scénariste et dialoguiste. Sa patte de réalisateur quant à elle s'efface de plus en plus. Vivement ses prochaines comédies.
Le rêve de Cassandre - Woody Allen

5.11.07

Le Zèbre de Ben

En précision à un billet précédent, Ben Ricour sera en concert le 8 novembre prochain, à 20h00, à Paris, dans la petite et belle salle du Zèbre dans le 11ème arrondissement.
Un concert pour fêter la sortie de son deuxième album (pas mal du tout soit dit en passant). Il ne sera plus seul sur scène comme lors de sa première tournée puisque 2 ou 3 compères l'accompagneront. Ça pourra être l'occasion de découvrir ce jeune chanteur prometteur pour ceux qui ne le connaissent pas (il n'y a rien de mieux que le live pour découvrir l'univers d'un chanteur); l'occasion de le retrouver sur scène pour ceux qui ont eu la chance de le voir sur sa première tournée (comme moi).
Il est bien évident que j'ai déjà pris mes places. Je n'allais pas manquer cela tout de même. Les billets sont réservables sur les tous les sites spécialisés habituels (avec un tarif adhérent pour ceux qui ont la carte de l'Agitateur culturel).

Panoramique percheron

Prieuré de Ste Gauburge vu de St Cyr La Rosière - Orne - 03/11/2007

L'eau des collines




Le soleil brûlant sur la garrigue desséchée. Le chant des cigales au pied des oliviers. Des odeurs de romarin. L'eau si rare sur ces terres arides. Des paysans robustes à la peau tannée par l'usure du soleil. Les accents âpres. L'appât du gain. L'envie. La jalousie. La méchanceté facile. La sournoisie. Le machiavélisme. L'arrivisme. Une victoire sans gloire. Une vengeance implacable. Marcel Pagnol. Yves Montand. Daniel Auteuil. Gérard Depardieu. Emmanuelle Béart. Jean de Florette. Manon des Sources.