2.9.07

Au théâtre ce soir : des souvenirs

Que de souvenirs dans ce lieu. Un des monuments les plus emblématiques de ma bonne ville de Mamers. Le théâtre. Il est joli ce théâtre qui fut une ancienne halle aux grains à la fin du 19ème siècle, puis transformée en salle de spectacles et de cinéma en 1936.
Il y a quelques semaines, de passage chez mes parents, je suis de nouveau entrer dans ce bâtiment qui regroupe à la fois, une salle de théâtre, une salle de cinéma et une salle des fêtes. A première vue, rien n'avait changé, entièrement plongé dans l'immobilisme d'une petite ville de province. Mais en m'installant dans la salle de cinéma, attendant que Ratatouille ne commence, je me suis rendu compte combien elle avait rajeuni cette salle.
Je me revois, à l'âge des culottes courtes, dans cette vaste salle des fêtes avec son sol en vieux parquet passé qui sentait bon la poussière et l'encaustique, m'essayant à mes premiers pas de danseurs pour les fêtes de l'école auxquelles je ne participais jamais par excès de timidité. J'entends presque encore les accords d'une chanson du terroir sur laquelle on devait suivre les "un-deux-trois, un-deux-trois" des maîtresses qui marquaient aussi le rythme à coup de règle en bois dans la main. Quels souvenirs ! La poussière dorée que nous soulevions de nos petits pieds, qui dansait dans la lumière vive d'un soleil de fin d'après midi d'avril. Mes pieds qui s'emmêlaient les pinceaux, les remontrances énervées de ma maîtresse, les rires moqueurs de mes camarades. Que j'ai détesté ces moments là.
Cette même salle qui se transformait une fois l'année en arbre de Noël gigantesque. Un Père Noël qu'on surprenait à picoler dans son coin et qui finissait par devenir encore plus rouge que son costume élimé. Tous ces gamins qui piaffaient d'impatience en attendant le petit cadeau que l'entreprise accordait à chacun des enfants de ses employés. Cette odeur de chocolat au lait qui flottait dans la salle mais qui avait curieusement un goût d'eau chaude quand on le buvait. Les échanges de cadeaux avec les copains. Et puis cette fois où ma petite soeur Zabou était en larme parce qu'elle n'avait pas eu son cadeau.
Dans ce théâtre, j'ai eu aussi mes premiers émois cinématographiques. Je me souviens encore parfaitement de mon tout premier film : Mary Poppins; j'avais dix ou douze ans. Il y eut ensuite le premier film avec ma classe : Le Dernier Empereur. Puis le premier film avec les copains : Hot Shot. Mon premier coup de poing cinéma : La liste de Schindler. Mes premiers émois vers ma longue route d'un garçon pas comme les autres : Les Roseaux Sauvages. Ma première daube : Le Zèbre. A cette époque, la salle du REX était dans un sale état. De vieux fauteuils miteux et défoncés qui n'étaient même plus rouges; le plâtre du plafond qui s'effritait et nous tombait dessus par tous petits morceaux; le petit écran blanc sur la scène; le son qui crachotait dès qu'il devenait trop fort. Je me souviens de nos fous rires étouffés et les "chut" exaspérés de ceux qui voulaient regarder le film en paix. Je me rappelle mon fou rire à m'en rouler par terre en regardant Hot Shot; à deux doigts de me faire pipi dessus tellement je riais.
Et puis, il y eut Mamers en Mars. Gaël Morel, Stéphane Rideau, Elodie Bouchez, Frédéric Gorny, François Ozon, Julie Gayet... Un petit festival fait de briques et de broc mais qui a toujours voulus se faire dans la joie et la bonne humeur. Un festival qui m'a permis d'appréhender le cinéma sous un autre angle : il n'y avait pas que le cinéma américain, il y avait aussi le cinéma britannique et allemand et italien et puis, le cinéma français aussi.
De façon étrange, ce que m'a apporté le festival dans l'éclectisme cinématographique m'a aussi éloigné du théâtre de Mamers. Car en dehors du festival, la programmation du cinéma était plutôt très commerciale. Je ne pouvais donc pas assouvir mon besoin de découverte ici. Le Mans puis Paris surtout auront remplacé très vite ma petite salle de ma petite ville de province.
Il m'aura fallu plus de 10 ans pour y remettre les pieds. Et malgré les souvenirs qui y sont rattachés, j'avais occulté complètement cet endroit. Je passais régulièrement à côté sans le voir ou sans qu'il réveille ces souvenirs. A tel point que je n'ai pas une seule photographie du bâtiment alors que tout le reste de la ville est passé sous la lorgnette de mon Konika Minolta. Il faudra remédier à cela la prochaine fois.

Aucun commentaire: