23.12.05

Passé si vite...


Je l'aurais finalement vu Melvil Poupaud. Sous toutes les coutures. Et même sans les coutures.
Rendez-vous avait été donné aux Halles pour aller voir ce film consacré à la préparation de sa propre mort.
On m'avait prévenu : " Tu vas pleurer Alexandre ". Effectivement... Ce qui avait été prévu est arrivé.
François Ozon construit son film sur les quelques semaines qui sépare Romain de son décès annoncé. Il est condamné. Il le sait. Il refuse de se battre et de croire en un vain espoir. Romain n'est pas sympathique dans la vie : autoritaire, superficiel dans ses rapports avec les autres. Je crois surtout que ce garçon ne sait pas exprimer ses sentiments. A l'image de ses rapports avec sa soeur ou son père. L'annonce de son cancer va produire un renfermement sur lui même. Il refuse de l'annoncer à ses proches car il ne sait pas comment le dire et a peur d'avoir à gérer le débordement d'affection qui pourrait en découler. Et comment faire pour n'avoir rien à annoncer? Il fait le vide autour de lui. Sa soeur; son père; son petit ami, quitte à renforcer son côté odieux. Tout son petit monde passe à la trappe. Seule sa grand-mère apprendra cette terrible nouvelle qui le bouleverse et seulement parce qu'il suppose qu'elle le comprendra "parce qu'elle aussi va bientôt mourir".
Tout ce film montre sans ambage, sans artifice mais sans guimauverie et pleurnicheries inutiles, la fin de ce jeune trentenaire. Par touche sensible, on s'attache à ce garçon. Mais à vouloir faire un film froid sans larmes excessives, Ozon réalise en fait un film trop clinique; sans âme, trop distancié pour vraiment se sentir touché par le malheur de Romain. C'est dommage car dès qu'il filme les rapports intimes entre les personnages, le drame qui est sous-jacent explose devant nos yeux. C'est dans ces scènes là que François Ozon réussit à toucher au plus prêt. Deux scènes sont très belles et réussies : celle de Romain et de son père, filmée très serrée, au plus prêt des visage, dans la voiture. Les non-dits de cette relation père/fils expliquent tellement le choix de Romain de se taire. Daniel Duval est excellent dans cette scène. Grace aux regards de l'un et de l'autre, toute la pudeur d'un père qui ne sait pas dire à son fils qu'il l'aime; toute la détresse du fils qui a besoin d'entendre qu'il est aimé de son père. Magnifique.
L'autre scène est sans aucun doute la plus belle du film. Romain et sa grand-mère, Laura, excellement jouée par Jeanne Moreau. Là aussi, plus que les mots rares ou généralistes, ce sont les regards, les gestes (tel une main négligemment posé sur l'épaule de Romain qui feuillette un album photos, le regard perdu dans une réflexion difficile) qui sont importants, qui prouvent cet amour entre eux.
Dommage que ces scènes sensibles soient si rares dans ce film.
Le Temps qui reste - François Ozon - 2005

3 commentaires:

Eltan a dit…

C'est bien, comme ca, je n'ai pas besoin d'ecrire ce que j'ai pensé du film. Je suis bien sur d'accord pour dire que la scène avec son père - parce qu'elles nous parlent -, et celles avec sa grand mère sont les moments forts du film.

Eric a dit…

J'ai oublié de parler de la scène finale du film (que je ne dévoilerais pas) mais qui est d'une beauté absolu. La solitude du héro qui a finalement accepter son sort et qui n'a plus peur. Ce coucher de soleil...

Joss a dit…

Il est pas encore dispo chez nous - hé!- mais, ça fait quelques blog que je visite qui en parle... J'ai un peu de difficultée avec Ozon... J'ai beaucoup aimé ses premiers films, mais les deux derniers,"Sous le sable" et "la piscine", je me suis considérablement emmerdé... Les images sont magnifiques, les acteurs sont justes, les thèmes sont intéressants, mais... J'ai comme l'impression qu'il cherche à faire des films avec des ingrédiants "in"... Avec des brins de scandales (que des brins)... mais ces recettes ne lèvent plus trop, je trouve... On voit bien ou il s'en va, on sent bien tous les ingrédiants, mais, on s'emmerde, non?