21.5.06

La solitude du couple

Une petite salle en fond de cour, pas très loin de la maison. Un atelier d'artiste en transformation, mais gardant tout son charme. Une petite salle sans chichi, minuscule et sans ostentation. Un mur de briques à peine enduit, des poutres de bois, une petite mezzanine, une scène semblable à un dancefloor de salle des fêtes. Une odeur aussi, mélangeant délicatement les essences du bois, de la poussière et quelques vapeurs d'humidité. Une petite pièce que j'aimerais bien avoir à la maison. Une population d'habitués semble t-il. Une quarantaine de personnes, pas plus, la salle ne pourrait pas en accueillir plus. Des Bobos du 19ème avec leurs codes allant jusqu'au baise-main dans des gestes évaporés. Un microcosme plaisant même si je m'y sens comme un étranger. C'est assez plaisant à observer tout ce petit monde là. Pourquoi donc, je me retrouve dans cet endroit à des années lumières de toute l'agitation de la rue de Belleville, pourtant juste à côté et de la place des Fête? Encore une fois, la volonté de partir à la découverte toujours plus d'horizons dansés.
C'est une histoire de couple à trois personnes. Deux humains qui cohabitent tant bien que mal et un autre matériel mais qui fait le lien entre les deux humains.
Un homme, une femme, une télévision. Les trois angles d'une figure géométrique aux contours flous.
Une relation basée sur une vague indifférence de l'autre. Chacun fait ce qu'il a faire de son côté sans voir que l'autre existe. Une relation d'amour gauche, aux gestes incertains, aux sentiments difficilement exprimés si ce n'est par une relative violence. Une relation de non-dits que seule le Titanic, le film de James Cameron réussit parfois à faire s'exprimer et à rapprocher les deux personnes. Une relation de la solitude à deux. Une relation fantasmée aussi. Le rêve de la femme de massacrer son compagnon qui épluche des pommes de terre. Le rêve de la femme de se trouver plus belle, en se transformant en Marilyn Monroe pour mieux séduire son compagnon sans succès. L'incompréhension deux personnes qui s'aiment mais ne parviennent pas à se le dire et qui finalement réussissent à se l'avouer qu'en jouant à des jeux dangereux en feignant la mort d'un des deux.
Cette petite pièce parle d'amour. De petites gens. De gens imparfaits. De quotidien qui arase tout dans une relation à deux, si on ne fait pas un minimum attention à l'autre. Une pièce évoquant les gens du Nord (les deux danseurs sont nés là bas) par de petites touches sensibles : une fanfare, un masque de géant de Carnaval, des accents rauques, des frites. Mais ce n'est qu'un clin d'oeil, car ce couple là se retrouve partout.
Une pièce simple, populaire, humaine et humaniste. Une pièce où les gestes choregraphiés sont d'une puissance poignante et touchante. Rarement, je n'ai ressenti autant d'émotions en danse contemporaine.
Même pas seul - Christine Bastin & Thomas Lebrun

Aucun commentaire: