9.8.06

Les sons silencieux

Chaque endroit a son propre bruit. Bien à lui. Un son si particulier que l'on sait de suite où l'on est. L'endroit le plus silencieux qui soit produit pourtant ses propres sons qui, si on ne tend pas un minimum l'oreille, peuvent passer complètement inaperçus. Sons de stress et d'énervements ou, au contraire, de quiétude et de repos.
Prenez par exemple la Gorçonnière. Un petit lieu dit, à cinq kilomètres de la ville de Vieillevigne, quelque part entre la Vendée et la Loire Atlantique. A peine dix maisons et des champs; des champs partout. Du maïs, du tournesol, des vignes et des pâturages avec des vaches paisibles et des chevaux fougueux. Peu de sons de civilisation : pas de sons de cloches, pas de klaxons et autres bruits motorisés. Quelques mobylettes et tracteurs. Un petits coin de campagne silencieux et préservé. Un des endroits les plus silencieux que je connaisse, je pense. Prendre le temps d'écouter ce silence réparateur. Allongé sur un transat douillet, à 10 heures, un dimanche matin, le visage déjà baigné par les rayons du soleil. Fermer les yeux et attendre que les bruits et les sons viennent à vous. Ils arrivent d'abord timidement, en sourdine, presque génés de vous déranger dans votre repos. Puis ils inondent vos tympans, tapageurs et heureux qu'on prennent attention à eux.
Tout d'abord, ce sons les chants flutés des oiseaux, clairs, nets. Symphonie cacophonique parfaitement orchestrée. Les brefs coucous rythment les longues tirades stridentes des hirondelles virevoltantes, tandis que le merle s'égosille du mieux qu'il peut pour tenter de répondre aux joyeux cui cui des moineaux insolents. Sons flagrants mais que les oreilles citadines ont oublié de reconnaitre avec le temps.
Viennent ensuite, les sons plus subtiles. Le souffle du vent dans les ramages d'un noisetier. Legers bruissements de feuilles chahutées d'un mimosa démesuré. Sifflements presque métalliques des longues feuilles coupantes d'un plumeau dépenaillé. Grincements sourds d'un cep de vigne retenu dans son envie de se détendre par un fil de fer porteur. Le balaiement de poussières sèches qui heurtent les structures métalliques d'une balançoire. Le vol d'un bourdon flanant de fleur en fleur. Dans le lointain, un meuglement de vache, les aboiements d'un chien, alors que dans la cuisine, ouaté par l'épaisseur des murs, le cliquetis des petites cuillères dans les bols du petits déjeuné annonce le café bien chaud mais aussi d'autres bruits et cris, humains cette fois-ci, enfantins.
Quand la tranquilité et la quiétude du dimanche matin sont troublées par les clapotis de six paires de pieds d'enfants dans la piscine gonflante; par les couinements plaintifs de la balaçoire malmenée; par les cris joyeux des petits en plein jeu, l'heure est venue pour moi de partir à la découverte de la campagne environnante. Dès le virage passé, un nouveau silence sonore m'envahit. Le vent est toujours là, jouant dans les entrelats des haies. Les oiseaux aussi, plus nombreux. Les chants sont aussi plus variés. Le bruit de mes pas qui claquent et qui résonnent sur la route, tellement fort dans ce le silence feutré, que j'ai envie de quitter mes chaussures. Ma présence chamboule le calme du lieu. Un oiseau invisible s'envole dans les branches d'un haut chêne. Au ras du sol, les petites bêtes bruissent, détalant par leur chemins cachés à ma vue. Partout des bruissements, d'ailes, de pas; d'oiseau, de mouches, de feuilles, de petites souris et autres petites bestioles. Bruissements étourdissants, tellement peu habitué à les entendre.
La nature vit. Elle se fait entendre. L'écouter pour gagner un peu de sa sérénité. Lui voler un peu de sa force vivante. C'est un peu pour cela que j'aime quitter Paris, de temps en temps. Retrouver la campagne pour retrouver ces sensations primaires qui font du bien à l'homme pressé.

1 commentaire:

E. a dit…

sans oublier les merveilleux nocturnes interpétés brillamment par grillons et grenouilles très en "voix" !!!