16.5.07

Au rayon des rencontres

J'avais lu dans les Chroniques de San Francisco d'Armistead Maupin, qu'à San Francisco, il n'était pas rare de faire des rencontres d'un soir, autour d'une salade ou dune botte d'asperges, dans le rayon primeur d'un supermarché. Mouse et Mary-Ann s'y sont d'ailleurs rencontrés. Mais, ça ne restait que de la littérature.
J'avais vu dans Queer As Folk, Justin et Brian draguer de façon sans équivoque autour d'une courgette au calibre adéquate, un charmant jeune homme, pour une consommation ultérieure tout autre que culinaire. Cela se passait aussi dans un supermarché, à Pitsburg. Mais, ça ne restait qu'une série télévisée.
J'avais entendu dire que les Galeries Lafayette avaient organisé, le jour de la Saint Valentin 2004, une vaste soirée célibataire dans les rayons et les étages du prestigieux magasin des Grands Boulevards. Mais, ça ne restait qu'une grande opération commerciale.
Il y a une vaste mythologie autour des rencontres dans un magasin, un grand phantasme. Mais ce n'est pas la vraie vie, me disais-je, au fond de moi même. Imaginez donc ! Se faire aborder par un grand gaillard en survêtement et à la main, un panier rempli de deux poireaux, d'un camembert moulé à la louche, de deux yaourts 0% de matière grasse saveur citron, d'une crème épilatoire pour homme spéciale cuisse et torse, de fil dentaire, d'un paquet de désodorisant pour toilette senteur mer du sud, et qui vous dit : vous êtes la personne que j'attendais depuis dix ans et pour le reste de ma vie. Franchement, pas très glamour.
Pourtant...
Pourtant, hier soir, comme souvent, au Monoprix du coin de la Place, j'effectuais mes quelques achats pour le dîner du soir même. Le nez plongé dans les rayons dans le but de remplir le panier; un oeil qui parfois traînait sur une silhouette fuyante. Ne me blâmez pas, ce n'est pas de ma faute. A 19h30, au Monoprix du coin de la Place, c'est la Fête. Adonis et Apollon semblent se donner le mot et rendez-vous pour se retrouver tous, au même endroit, au même moment. Au rayon, viande fraîche en libre service, j'en suis encore à me demander sur quoi arrêter mon choix. Lentement, je fais un premier passage pour voir la totalité de l'offre. Je m'arrête devant les Cordons Bleus (oui bon, je sais pas très original ! Mais on avait décidé avec le Sage E. : facile à préparer). Du coin de l'oeil, je remarque, sans m'y attarder plus que cela, un jeune homme qui semble avoir les même doute quant à son menu du soir.
- Bonsoir !
- Heu... Bon... Bonsoir...
- Excusez moi de vous déranger. Je peux vous poser une question?
- Heu... Oui... Oui, si vous voulez...
- Qu'allez-vous manger ce soir?
- ... !!!???
- Je ne sais pas quoi acheter. Pas la moindre idée. Peut-être que vous allez pouvoir m'influencer.
- (glups!) Heu... Je pense que ça sera Cordon Bleu
- Ah oui ! Avec une frisée, ça peut être très bien.
- (sourire crispé). Heu... Oui... Tout à fait...
- Et vous mangez seul?
- (Haaaaaa ! Au secours !) Non, non ! J'ai trois personnes qui m'attendent à la maison.
- Et bien, bon appétit et bonne soirée.
- Mer... Merci ! Vous 'si
Bon sang ! La drague dans un supermarché, ça existe vraiment dans la vraie vie ! Je n’en reviens pas. Je devais être rouge pivoine tirant méchamment sur le coquelicot bien corsé. Je me suis senti gêné jusqu'à la racine de mes pauvres cheveux. Gêné mais flatté, de l'intérêt qu'on m'a sommairement porté. Je suis pas un Garçon pas comme les autres © pour rien, tiens.

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