25.1.08

Brève de métro # 8

Les stations de métro parisiennes ont encore beaucoup à faire pour faciliter la vie de ses usagers. Pas forcément pour l'usager lambda comme moi. Plutôt pour l'usager particulier. Celui qui se déplace avec des béquilles ou bien les personnes à mobilité réduite ou bien encore la maman qui doit voyager avec son enfant en bas âge, dans une poussette ou un landau. Combien de fois voit-on ces personnes galérer dans les escaliers d'une station.
J'essaie souvent d'aider les mamans empêtrées avec leur poussette. Ce n'est pas grand chose, mais si je le peux, j'aide à porter l'engin à roulettes. L'autre jour, à la station Châtillon, terminus de la Ligne 13, une femme et son bébé profondément endormi dans son landau essayait tant bien que mal de descendre l'escalier menant vers la sortie.
Il faut dire qu'elle est mal foutue cette station. Le quai est à l'extérieur et la sortie se fait par des escaliers étroits et raides, à deux volets d'une vingtaine de marches. Comme les quais sont actuellement en travaux, il faut se coltiner la descente engorgée par des voyageurs descendant et montant. Pas facile pendant les heures de pointe.
Je propose donc mon aide à cette femme qui l'accepte bien volontiers et avec un grand sourire chaleureux. Je saisis le landau par l'avant, et ma prise est une sorte de longue bande de plastique rigide qui se trouve entre les deux roues avant. Le landau est lourd, ma position pas forcément très pratique, et la foule des autres voyageurs qui passe en bousculant ne nous facilite pas la vie. On y va très lentement, histoire de ne pas faire de faux pas et de déranger un minimum la progression des autres usagers toujours très pressés de retrouver leurs bureaux chauffés. Nous en étions au premier tiers de l'escalier. La maman m'a déjà demandé deux ou trois fois si ça allait pour moi. Je réponds oui oui, par principe, mais l'effort que cela me demande me donne très chaud.
Soudain, je sens la languette de plastique qui me sert de prise qui lâche prise. Sans plus aucun soutien, le landau vient s'écraser contre mon épaule et dans son élan (et par l'effet de surprise) me fait reculer d'une ou deux marches. La mère, elle aussi surprise, pousse un cri strident et commence à retenir de toutes ces forces le landau. Ce qui a pour effet de le déséquilibrer et de le faire pencher vers la gauche. J'essaie de le maintenir comme je le peux mais ma situation peu confortable m'empêche de trouver une prise plus conséquente. Une sueur froide me pique les yeux. Je sens mon épaule douloureuse et mon biceps tordu commence à donner des signes de fatigue. Un voyageur vient à notre rescousse et redresse le landau. Nous sommes à trois maintenant pour descendre cet engin, bloquant définitivement le passage pour les autres passagers que j'entends râler.
Tout cela n'a duré que quelques secondes; une minute tout au plus, le temps d'arriver en bas. Mais cela m'a paru une éternité. Lorsque le landau a été posé sur ces quatre roues, je me suis excusé, presque en faisant des courbettes, tellement j'étais désolé. La maman s'excusait aussi de m'avoir infligé cela. Et pendant ce temps, le bébé dormait comme seul un bébé sait le faire, comme un bienheureux. Ses petits poings serrés à hauteur de sa frimousse pouponne. Il ne s'était rendu compte de rien. De le voir ainsi nous a fait rire. Nous nous sommes dit au revoir et bonne journée et je suis parti vers le bureau en tremblant, imaginant ce qui aurait pu arriver de pire. Je voyais le bébé rouler dans les escaliers; la mère hystérique qui hurlait en me frappant pour mon incompétence et ma négligence, me demandant aussi de rembourser le landau que j'avais cassé; les voyageurs qui me jetaient l'opprobre en m'insultant; et moi qui devenait de plus en plus petit...
Heureusement, plus de peur que de mal mais il serait temps que les gens compétents de la RATP se rendent compte que les escalators, ça existe depuis bientôt plus d'un siècle et que ces escaliers mécaniques ne sont vraiment pas un luxe pour bon nombre de leurs stations.

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