7.3.08

Répétition publique

Je me suis toujours demandé comment ça se passait la création d'une pièce chorégraphique. Tout le processus. Le choix de la musique, des lumières, des costumes. Tout le travail qu'il y a à fournir avant de présenter une pièce "parfaite" sur scène. C'est vrai que, moi, spectateur, je vois quelque chose d'abouti, qui me plaît ou pas. Mais derrière tout ça, les danseurs ont dû fournir un travail énorme; de longues heures de répétition. Je n'avais qu'une idée vague de tout cela.
La semaine dernière, de passage pour un long week-end à Nantes, le Sage E. voit dans Ouest France un petit article sur la nouvelle création de Claude Brumachon qu'il doit présenter au Théâtre Graslin ces prochains jours. Le chorégraphe propose une répétition publique le soir même pour les curieux. Le Sage E. est emballé. Voilà longtemps qu'il n'a pas vu quoi que ce soit sur le travail du directeur du Centre Chorégraphique National de Nantes. Il veut y aller.
Je dois bien dire que je n'étais pas forcément très partant pour cette expérience, plein d'a priori pas vraiment positifs. Je connais assez mal (voir pas du tout, en fait) son travail. Pour moi, ce type de soirée publique doit être d'un ennui profond et sans doute vide de tout public. A ce moment là, j'avais bien plus envie d'une soirée ciné que d'aller m'ennuyer dans une répétition qui, à n'en pas douter, serait barbante. Mais, la vie n'est faite que de concessions, n'est-ce pas? Alors, j'ai fait plaisir à mon Sage et je l'ai suivi là-bas.
Le centre chorégraphique est installé dans une ancienne chapelle des Capucins du 19ème siècle, rue Noire. Le bâtiment est strict, sans fioriture, mais très imposant. L'intérêt architectural du lieu commence à éveiller ma curiosité. Au moins, la répétition ne se passera pas dans un sous sol miteux d'une MJC du coin. Autre surprise, il y a du monde à attendre. Beaucoup de monde même. Le public est assez disparate mais tous semblent pressés de voir ce que le chorégraphe va proposer. Nous sommes rentrés dans la salle qui occupe toute la nef de l'ancienne église. Des gradins d'un côté, le plateau immense et parqueté en face. Nous sommes accueillis par Benjamin Lamarche, assistant et danseur de Brumachon. Il est tout sourire et assez charmant, je dois dire. Sur la scène, trois personnes s'échauffent. Le public est sympathique et parle du chorégraphe en l'appelant par son prénom.
La première chose qui m'a frappé quand la répétition a commencé, c'est la proximité immédiate entre les danseurs et le public. Il n'y a plus cette distance et cette frontière très nette qu'il y a dans une salle de spectacle. Peut-être le manque d'artifice crée t-il cette proximité : pas de jeu de lumière, pas de costumes. Les danseurs ne sont plus ces êtres inaccessibles et parfois un peu froids et distants. Ici, ils sont des personnes comme moi. Ils sont imparfaits. Ils tâtonnent; font la grimacent quand ils se trompent; leurs gestes ne sont pas forcément élégants ou même synchrones. Ils répètent tout simplement. Et du coup, je les ai trouvés touchants parce qu'humains.
Sur le plateau, il y a Brumachon et une danseuse. Un ténor chante du Britten sur une bande son orchestrée par Lamarche qui est le scrutateur de ce qui se passe sur scène. La répétition n'a duré que 45 minutes. Brumachon qui n'était pas satisfait de sa performance a vite arrêté la répétition. Il est vrai que ce que nous avons vu, était loin d'être abouti. Un peu lourd, manque de cohésion. Le chorégraphe l'a dit lui même, il n'était pas dedans. Il ne se sentait pas dans la pièce. Le chorégraphe expliqua alors son raisonnement par rapport aux répétitions. Pour lui, trop répéter tue la spontanéité et la fraîcheur du mouvement. Il s'interroge sur la voie à donner à son travail, souhaitant aller vers plus de spontanéité. Mais que serait une pièce chorégraphique sans répétitions? Dilemme.
Quoi qu'il en soit, cette expérience a été suffisamment intéressante pour que l'envie germe de voir ce spectacle sur scène. Il doit la jouer au Théâtre Graslin la semaine suivante. Alors que rien n'était prévu, nous nous sommes décidés à revenir le week-end suivant pour voir ce que cela pouvait donner avec les costumes et la lumière. J'ai hâte.

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