21.2.05

Portrait

Assis sur une chaise, seul et esseulé, dans cette salle de restaurant rapide, l'homme mangeait une soupe aux potirons.
Les cheveux blancs, les sourcils blancs et longs, la barbe drue et blanche. De profil, un visage buriné, le visage d'un voyageur au long court; le profil d'un marin breton, sans la casquette et sans la pipe. Mal et peu vêtu, légèrement sale, cet homme fait un peu clochard.
Cependant, il m'évoque plus un doux rêveur, un peu poète, un peu bohème.
Il a les yeux bleus, d'un beu du ciel, du bleu du ciel qui nous a accueilli à notre arrivée à Londres. Un regard expressif qui donnait envie de connaître cet homme, de le découvrir et de savoir à quoi il pensait, là, assis devant son petit bol de soupe aux potirons.
Il savoure cuiller après cuiller, la chaleur bienfaisante de son potage. Le regard bleu, perdu dans des pensées lointaines ou bien bercé par les arômes chaudes, il regarde vers l'extérieur, un petit sourire satisfait aux lèvres.
Dans ce regard bleu étincelant, soudainement, un éclair de tristesse, un flash de solitude, une lueur de détresse. Comme perdu, le regard fou, à la recherche d'un regard aidant. La croisée rapide de nos deux regards, l'echange furtif d'un sourire timide, il rougit un peu embarrassé, puis retourne dans ses pensées.
Qui est-il? D'où vient-il? Que fait-il? Où va t-il? Quelle est sa vie?
Toutes ces questions, je me les suis posé, samedi après-midi, dans cette salle de restaurant rapide, devant cet homme et son petit bol de soupe aux potirons. Je n'ai, bien sûr, pas de réponses à apporter. Seulement, un sentiment, une impression, une image de lui. L'image d'un homme qui a des choses à raconter si seulement on voulait bien l'écouter. Si seulement, j'avais osé...

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