2.5.07

Le ronfleur

Autant les trains du samedi matin sont bruyants et tapageurs, autant ceux du dimanche soir sont calmes et endormis. Pas de cris d'enfants énervés. Pas de conversations intempestives dans un portable. Pas de glousseuses invertébrées ou même pire. Non, dans les trains du dimanche soir, les gens dorment, harassés par le week-end passé, par la nuit agitée d'un samedi arrosé. L'observation de ces gens là donne un patchwork de situations endormies.Il y a ceux qui dorment recroquevillés contre la fenêtre du train (j'en fais parti). Ceux qui dorment la tête dans leurs bras croisés sur la tablette de leur siège. Ceux qui dorment paisibles sur l'épaule de leur voisin voisine. Ceux qui dorment en s'étalant de tous les côtés. Il y a ceux qui dorment la bouche fermée. Ceux qui dorment la bouche ouverte. Ceux qui dorment le visage agité par des tics nerveux. Ceux qui dorment comme des bienheureux, le sourire béat accroché aux lèvres. Ceux qui dorment la mine renfrognée.Et puis, il y a ceux qui ronflent. De la légère respiration forte aux roulements de tambour. Dimanche, dans le train qui nous ramenait vers Paris, j'ai rencontré le maître incontestable des ronfleurs wagonés. Il était vautré sur deux sièges, les pieds posés sur un troisième en face de lui. Sa casquette vissée sur les yeux le protégeait de la lumière blafarde des néons du wagon. Il appartenait à la catégorie "bouche ouverte"; même plus grandement que la moyenne. Et il ronflait. Tellement fort qu'il a réussi à réveiller la totalité du wagon pourtant bien endormi. Même moi, qui avait les oreillettes du walkman et Arcade Fire à fond dedans. Un à un, les voyageurs se sont réveillés, se demandant quel animal pouvait bien grogner aussi fort. Lorsque qu’ils se sont rendus compte que ce grognement là était humain, ils ont commencé à sourire puis à rire. Le voyageur en face de lui, au bout d'un moment, ne tenant plus, a fini par le secouer d'abord gentiment puis plus énergiquement pour le réveiller. Ce qu'il fit, affolé, se demandant bien où il était et ce qu'il se passait. Les sourires moqueurs ont suffi pour qu'il comprenne et, sans se démonter plus que cela, a fait un signe de la main en guise d'excuse avant de se replonger dans le sommeil sans pour autant recommencer ces ronflements. A moins qu'il n'en est pas eu le temps. Le train arrivait en gare de Montparnasse et déjà les va et vient des voyageurs voulant être les premiers à descendre sur le quai, le tirèrent à nouveau du sommeil.

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