29.6.08

Mama, Corsica !

Plage de l'Arinella - Lumio - Corse - 22/06/2008

On m'avait prévenu que la Corse est une île de beauté. Les récits des plages de sables blancs, l'eau transparente, les montagnes de l'arrière pays... On m'avait raconté tout cela. Il y avait aussi les photos, les guides qui nous ont aidé à préparer la semaine de vacances avec les jolies gravures toutes glacées, les commentaires qui donnent l'impression d'y être déjà rien qu'en fermant les yeux. J'ai vu, j'ai lu tout cela. Mais je ne pouvais pas m'attendre à un tel choc. D'abord, c'est la chaleur qui m'a punché comme un uppercut. Il faut dire que le thermomètre avait bien du mal à afficher les vingt degrés à Paris. Une heure trente plus tard, il explosait à plus de trente degrés. Ça fout un choc thermique revigorant, il n'y a pas à dire. Quel bonheur de suer comme un damné tandis que les rayons de soleil mordent à pleine dent la peau trop blanche et trop tendre de mes bras, de non nez et de mon front. Que c'est agréable de sentir la climatisation de la 207 de location tenter vainement de rafraîchir le four qu'est devenu l'habitacle de la voiture.
Ensuite ce sont les odeurs qui m'ont agrippé. Je passe sous silence, bien entendu, les odeurs de kérosène qui nous ont accueilli sur le tarmac de l'aéroport de Calvi. Ces odeurs là sont internationales. Celles là, elles ne comptent pas. Je parlerais plutôt des odeurs végétales qui exhalent leur plus beaux parfums partout où c'est possible. Les odeurs boisées des pins et des palmiers. Les odeurs sucrées des bougainvilliers ou celles piquantes de géranium énormes et poussant à l'état sauvage. Il y a les odeurs iodées des plages magiques, ces odeurs qui viennent et reviennent au rythme des petites vagues. Les odeurs acres de la terre ou du sable qui s'envolent en fine poussière avec le vent. Et puis, partout ces bonnes odeurs d'herbes séchées. Partout, dans les villages, sur les chemins des garrigues, sur les rochers, dans les forêts. Ça sent les herbes de Provence qui émerveillent les sens. Elles deviennent presque palpables, éléments fondamentaux des paysages de la Balagne.
Parlons en des paysages. Combien de fois je me suis exclamé devant la beauté de cette région. Ça a commencé dans l'avion, pour tout dire. Quand il a cherché à atterrir sur la langue d'asphalte, entre deux massifs montagneux. Je n'en croyais pas mes yeux tellement c'était beau. Il faut voir pour le croire. J'en est presque oublié le stress que provoque chez moi les atterrissages (j'ai bien dit presque, ça ne m'a pas empêché de serrer les fesses consciencieusement). Il y a la beauté des villes et des villages aux maisons colorées, aux volets bleus ou verts, écrasés par le soleil implacable. Les places ombragées poussiéreuses où il y a toujours un groupe de papys qui devisent sur le monde, assis sur des bancs déglingués, à l'ombre d'un olivier ou platane, ou bien sur les rebords d'une fontaine paresseuse, tout en regardant des plus jeunes jouer à la pétanque. Les vues panoramiques à partir de villages, accrochés à des pitons rocheux. Véritables nids d'aigle qui semblent inaccessibles mais qui offrent à celui qui se donne la peine de pousser plus loin que ce qui est écrit sur un guide, des points de vue à couper le souffle. Une terrasse d'un hôtel restaurant offrant une vision à 180° sur les montagnes et la baie de Calvi, tandis qu'un haut parleur chantonne des polyphonies reposantes. Prendre son petit déjeuner ou une boisson fraîche en admirant ce paysage panoramique, le matin, l'après midi et même au lever du jour, très tôt, est une expérience inoubliable. La baie de Calvi. Ah, la baie de Calvi. C'est quelque chose. Quelque soit l'endroit où on la regarde, que se soit du haut de la citadelle de Calvi, de la pointe sauvage de la Revellata, des rues abandonnées d'un village fantôme ou des rues silencieuses d'un village endormi, ou bien encore d'une plage de sable blanc, on reste subjugué par la beauté de ses eaux transparentes et turquoises. S'allonger mollement sur un drap de bain, face à la mer, face au soleil, en plissant les yeux, et regarder les vaguelettes translucides. Deviner dans les jeux de miroir de ses eaux, les boules noires des oursins ou les petits poissons qui n'hésitent pas à vous embrasser sur les chevilles. S'asseoir sur un rocher ou à la terrasse d'une paillote délicieuse et regarder le soleil se coucher en fanfare éclatante et colorée. Sentir sur ses coups de soleil, ce petit vent frais qui se lève dès que l'astre du jour a tiré sa révérence. Observer un vol de mouettes ou la course d'un petit bateau en ombres chinoises sur le brasier d'un ciel en feu. Se répéter en souriant, comme le faisait remarquer l'ami Cyril, que devant tant de beautés, on serait nationaliste sans hésitation si on était corse. Remercier, re-remercier et remercier encore et toujours, Jérémie et Gaelle de nous avoir permis de découvrir la Balagne, en décidant de se marier dans un endroit aussi paradisiaque. Se promettre, la main sur le coeur, et de plus en plus souvent au fur et à mesure que la semaine avance, qu'on reviendra là, à cet endroit très vite parce que cela devient presque vital. Conjurer le sort en mettant un caillou entre deux rochers de mer, juste avant de quitter pour la dernière fois la plage, comme lancer une piécette dans une fontaine romaine, pour se dire qu'on le cherchera la prochaine fois qu'on reviendra.
Pleurer ! Oh oui pleurer comme un gosse, le dernier soir, en quittant la plage; en regardant les montagnes rosées par le soleil couchant; en sentant les herbes séchées par le soleil de plomb et en entendant les vagues s'écraser calmement sur les rochers devenus noir dans le rougeoiement du ciel. Pleurer parce qu'il a bien fallu réaliser que le paradis sur terre ne dure jamais à l'infini. Ces quelques jours où on a oublié; où on a refusé de se souvenir du quotidien n'étaient qu'une parenthèse. Une parenthèse magique, une parenthèse enchantée, certes, mais seulement une parenthèse. Une parenthèse que j'ai accepté de refermer mais à la seule condition de pouvoir y insérer des points de suspension. En attendant...

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